Micromania

Mujeres © Ivan Montero
Julien Broquet
Julien Broquet Journaliste musique et télé

Un (faux) départ émaillé par des pannes de courant, une chaleur de bête, une ambiance imbibée et quelques très bons concerts… Le quatrième Micro Festival a (bien) vécu.

Robbie Williams au stade roi Baudouin, Woodkid et le Buena Vista Social Club à Esperanzah!, les Nuits Secrètes à Aulnoye-Aymeries. Killing Joke, Iggy et ses Stooges aux Fêtes de Lokeren, la résurrection de Nandrin, Dranouter, Ronquières, le Gouvy Jazz & Blues Festival… La concurrence a beau être solide sur le premier week-end du mois d’août, ils sont quelques-uns devant l’Espace 251 nord à tenter désespérément de trouver un ticket. Décliné sur deux jours depuis l’an dernier, le Micro Festival affiche une nouvelle fois complet. Une scène, des prix démocratiques (12 euros les 2 jours, 2 euros la pinte), pas d’écrans géants et d’hôtesses Jupiler. Le Micro prend son temps. Et possède quelque chose de dépaysant.

Déjà, le Micro joue la carte de la découverte et de l’inconnu. Pas des têtes de gondole chez Carrefour. Certains ont acheté leur ticket sans connaître un seul nom à l’affiche. Ca fait du bien dans un monde PureFMisé qui glorifie la heavy rotation et le matraquage de cerveau à te faire saigner les oreilles. Honneur aux régionaux de l’étape. En une micro demi-heure, les Scrap Dealers, garagistes liégeois, qui ont pour la petite histoire bossé avec Dirty Coq de l’Experimental Tropic Blues Band (le monsieur Loyal du festival), prouvent qu’ils feraient une bonne première partie pour Thee Oh Sees, Ty Segall ou les Black Lips… Il y a pas encore de disque et ça manque un peu d’action. De roulages de pelle, de mollards, de gens qui se désapent et de bières qui volent… Mais ces cinq-là semblent sur la bonne voie. Celle d’un rock déglingué qui en a dans le pantalon.

Idéal avant Shannon and the Clams. Bien en chair, Shannon Shaw, qui a pris de plus en plus de place dans Hunx and His Punx (elle a coécrit et chante plusieurs titres du nouvel album, Street Punk, récemment sorti chez Hardly Art), semble tout droit sortie d’un film de John Waters. Avec sa fine petite moustache, son acolyte Cody Blanchard a justement des faux airs du réalisateur de Baltimore, roi du cracra, amoureux des formes généreuses.

Une guitare, une basse, une batterie, trois voix (et quelles voix)… Shannon et ses palourdes font dans la pop garage oldies, le surf et la musique de girl groups. Même les quatre pannes de courant dues à un groupe électrogène récalcitrant n’ont pas raison de l’enthousiasme californien. Une heure dans les lattes. Mais tout finit par rentrer dans l’ordre sans intervention de la police pour tapage nocturne malgré quelques libertés prises avec le couvre-feu.

Avec Metz, des furieux et abrasifs Canadiens d’Ottawa (fans de Jesus Lizard et de Black Flag), et surtout les hypnotiques et psychédéliques Moon Duo (en trio) d’Erik Ripley Johnson (Wooden Shjips), la première journée du Micro est aussi la meilleure.

Méga picole, « micro » siestes… Le samedi après-midi, tout le monde se laisse vivre. Les Allemands de Camera, héritiers de Neu! et Can, sont formidables mais leur krautrock rampant s’accommode mal du soleil, de la lumière et d’un volume sonore tassé. Si Die! Die! Die! est un peu chiant, chiant, chiant, les grands gagnants du jour, ce sont les invités surprises. Les Espagnols de Mujeres. Les Black Lips de Barcelone. Appelés à remplacer les Holograms, experts en plans foireux qui ont déclaré forfait au lendemain de leur annulation douroise, les quatre Catalans ont la niaque et boostent la soirée à coups de petits hymnes garage punk énervés de trois minutes montre (et pinte) en main. La reprise de Run Run Run (Velvet is in the house) fait son effet. Le bon concert au bon moment. L’un des seuls qui secouent un public de manière générale plus attentif et curieux qu’excité. Il est minuit et des poussières. Et tandis que « Western bazar » (The Suicide of Western Culture) achève le Micro, l’after peut commencer dans la moiteur de la Caserne Fonck. A l’année prochaine.

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