Critique | Musique

REM – Collapse Into Now

ROCK | Sans forcément se renouveler, R.E.M. confirme son regain de forme avec « Collapse Into Now ». En fin de contrat, le groupe sort peut-être son meilleur disque depuis 10 ans.

Dans le rock, plus qu’ailleurs, il n’a jamais été facile de vieillir. Trente ans après la sortie de son premier single, R.E.M. est toujours là, digne et intègre. Avec cet exploit supplémentaire de faire à chaque fois peu ou prou le même disque. Bien sûr, Radio Free Europe (1981) a peu à voir avec Discoverer, le morceau qui entame le nouvel album. Et pourtant, les 2 chansons fonctionnent au même carburant. Une même approche du rock qui serait moins démagogique qu’humaniste, préférant mettre en avant une certaine fragilité plutôt que de bomber le torse crânement.

Si R.E.M. a toujours creusé le même sillon, il ne l’a évidemment pas toujours fait de la même manière. Ou avec la même réussite. Depuis le départ du batteur Bill Berry en 97, le groupe devenu trio n’a jamais vraiment retrouvé la flamboyance des débuts. Up (1998) a pu donner le change, mais Reveal (2001) et surtout Around The Sun (2004) ont paru être des coups dans l’eau. Il y a 3 ans, cependant, Accelerate avait montré un regain de forme, disque sec et compact, toutes guitares en avant.

La beauté du geste

En ce sens, Collapse Into Now en est le prolongement direct. L’album s’ouvre ainsi avec un Discoverer direct, presque euphorique. « This is not a challenge/It just means that I love you », chante Stipe, qui évacue toute pression. En 2011, R.E.M. n’est plus au centre du jeu, mais compte bien jouer encore sa partie, pour le fun, presque pour la beauté du geste. Enchaîné avec All The Best, le disque propose un début tonitruant, tendu. Plus loin, les mélodies de Mine Smell Like Honey ou That Someone Is You renvoient directement aux années Murmur, sans jamais tomber dans l’auto-parodie, mais sans forcément non plus retrouver la même légèreté. En fait, la moitié du disque s’amuse à monter dans les tours, jusqu’au morceau Alligator-Aviator-Autopilot-Antimatter, rock presque punk, voire bourrin, avec son mur de guitares et Peaches pour emballer le tout.

L’autre moitié de Collapse Into Now propose la face plus posée de R.E.M., celle qu’il a finalement le plus travaillée, et qui lui a donné ses plus beaux albums. Le début de Überlin fait forcément penser à celui de Drive, qui ouvrait l’indépassable Automatic For The People. S’il n’y avait son sujet -l’après-Katrina à la Nouvelle-Orléans-, Oh My Heart pourrait de la même manière passer pour un morceau oublié des sessions de Out of Time -mandoline comprise-, tandis qu’Everyday Day Is Yours To Win sonne volontiers comme la face B d’Everybody Hurts.

En 2011, R.E.M. a très probablement ses chefs-d’oeuvre derrière lui. Il fait mine de l’accepter, sans pour autant baisser la garde. Pour le coup, Collapse Into Now compile d’ailleurs bien la trajectoire du groupe, ses différentes facettes. En toute fin de disque, sur Blue, Patti Smith vient faire le contrepoint chanté au talk over de Stipe (« I want it all, this is my time… »), avant que ce dernier ne relance Discoverer, comme pour boucler la boucle. Oui, R.E.M. fait toujours le même disque. Mais cela fait un petit temps maintenant qu’il ne l’a plus fait avec autant de réussite.

R.E.M., Collapse Into Now, distribué par Warner, ***

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Laurent Hoebrechts

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