Le facteur Gaga

© Epa

On est en 2010 et il convient de choisir : pour ou contre Lady Gaga ? Autant en avoir le coeur net : après un premier passage au mois de mai, la donzelle revenait par deux fois rendre visite au Sportpaleis anversois, lundi et mardi soir. L’occasion d’aller jeter un oeil.

Tout commence avec Dance in the dark, et sa sentence : I’m a free bitch. Elle, ensemble mauve à épaulettes larges et pointues, lunettes noires. Grosse ambiance, gros son, gros synthés eighties. On prend note : des éphèbes noirs en bas collants, une carcasse de bagnole défoncée à la Grease, un guitariste et une harpiste hardo-kitsch. Pas vraiment le royaume de la finesse, mais le spectacle est au rendez-vous. D’ailleurs, troisième morceau : Just Dance, et un premier pic.

Le sens, le message ? Il arrive :  » Just follow the glitter way « . Mais encore ?  » Be what or whoever you want to be « , comme double contrainte lancée aux fans. Dans le cas de Lady Gaga, cela donne une stakhanoviste de la pop, une machine de guerre post-Madonna prête à toutes les extravagances. Est-ce d’ailleurs pour cela que la star parle autant entre les morceaux ? Pour montrer que, derrière la star inabordable, il y a  » un être sensible « , un  » coeur qui bat « . On veut bien, mais c’est encore quand elle prend son air blasé, et éructe comme une Antéchrist, façon Johnny Rotten, qu’elle nous trouble le plus la Gaga. Soit.

La star dialogue ( ?) avec le public, ramasse et enfile un t-shirt envoyé par un fan,… elle répète encore,  » from the bottom of my heart « , que si elle est là, ce n’est pas pour l’argent, mais pour l’amour du public. D’ailleurs,  » this ain’t about record sales, this ain’t about ticket sales, it’s about a connection, it’s about a generation « . Voilà pour la « gagaïsme » du jour, prononcé alors qu’elle exécute Speechless. C’est le moment piano solo de la soirée : Lady Gaga ne doit pas seulement montrer qu’elle a du coeur, mais aussi qu’elle est une vraie artiste, et pas un produit préfabriqué. Pendant Teeth, elle hurle même :  » I’m not fucking lipsync « . En fait, de cela on en doutait pas trop. Sinon comment en être arrivé là aussi rapidement – après tout, Stefani Germanotta n’a que 24 ans.

Elle enchaîne avec You and I, morceau inédit à paraître sur le prochain album, Born This Way, prévu pour l’an prochain. Par la suite, le ton redevient plus agressif. Mais les changements de tenue (la soirée est autant un concert qu’un défilé de mode) casse systématiquement le rythme : c’est quand que ça décolle vraiment ? Il y a bien un peu de provoc’ pour titiller les âmes les plus prudes. Mais qui ce soir-là dans l’enceinte anversoise est vraiment contre les droits des homosexuels, présents d’ailleurs en masse ? Y a-t-il encore quelqu’un pour s’émouvoir devant l’apparition en fin de concert d’un Christ ailé et ensanglanté à partir du moment où même le Pape commence à tolérer l’usage de la capote ?

Après deux longues heures, divertissantes (c’était un mininum) mais jamais époustouflantes, Lady Gaga conclut avec Bad Romance. Conclusion du jour : en mélangeant sons nineties et provoc’ eighties, l’Américaine définit peut-être bien une certaine pop. De là à la révolutionner…

Laurent Hoebrechts

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