La domination masculine

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Sans théoriser, sans faire appel à de soporifiques spécialistes, Patric Jean explore dans ce documentaire les discours et les comportements pour faire émerger les modèles qui régissent nos quotidiens.

Eric Zemmour, cité dans ce documentaire, avait déclaré à l’occasion de sa sortie en salle: « Je suis sidéré. Moi je vous fais un montage de n’importe qui, qui dit n’importe quoi et ça justifie alors au choix qu’Hitler ait attaqué la Pologne, que Staline ait massacré des millions de gens… (…). Ce sont des manoeuvres de voyou, des manoeuvres de terrorisme médiatique. C’est un scandale. Ce type (NdlR: le réalisateur Patric Jean) est un minable! » Et c’est vrai que ce film de 95 minutes est construit pour appuyer la thèse du cinéaste.

Mais sa thèse, on peut difficilement s’y opposer, quand on est un être humain normalement constitué, un mininum éduqué et conscient du monde dans lequel on vit. Le troisième millénaire est sexiste, partout, tout le temps. Une domination masculine qui prend des formes plus ou moins insidieuses, qui se larve plus ou moins discrètement dans chaque composante du quotidien.

Sans théoriser, sans faire appel à de soporifiques spécialistes, Patric Jean (auteur par ailleurs d’un très engagé et très beau documentaire sur les migrations, D’un mur à l’autre) explore les discours et les comportements pour faire émerger les modèles qui régissent nos quotidiens, de Kaboul à Palavas-Les-Flots. Le plus étonnant étant de constater à quel point les schémas, une fois intégrés (en gros, depuis la minute où l’on naît), ne sont jamais questionnés.

Pas de grands génies

Interrogées lors d’une soirée speed dating, quelques jeunes femmes affirment ainsi rechercher un homme arrogant, jaloux, et « il vaut mieux que ce soit lui qui gagne plus ». Dans la même veine, mais 50 ans plus tôt, Pierre Tchernia, dans un salon de l’électroménager: « Je suis ravie que l’on mette au service des femmes des moyens aussi modernes de travailler. Mais j’ai l’impresssion que malgré tout, depuis des milliers d’années que l’on s’intéresse aux arts ménagers, l’outil le plus parfait, le seul qui ravaude, qui lave, qui épluche les pommes de terre, qui soigne les enfants et qui sourit à son mari, c’est la femme. Alors n’hésitez pas… achetez une femme! » N’oublions pas non plus cette saillie intellectuelle de Léo Ferré, il y a longtemps mais enfin bon: « Il n’y a pas de femme grand génie ».

Impeccablement construite, La domination masculine propose également des témoignages qui, par extrapolation, se révèlent particulièrement inquiétants quant à la marche du monde. Ceux de masculinistes québécois, hommes frustrés par la perte progressive de leurs prérogatives dans la société dans laquelle ils évoluent (le Canada étant à ce sujet-là loin devant nous), brimés par l’émancipation des femmes, et qui estiment que « le féminisme est un crime contre l’humanité », et qu' »une claque, ça va faire mal sur le coup, mais bon après… »

La domination masculine, 22.00 sur La Une.
Documentaire de Patric Jean.

Myriam Leroy

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