Sufjan Stevens @ Bozar: l’adieu aux larmes

Sufjan Stevens, tournée "Carrie & Lowell" © CC/Flickr/starbright31
Julien Broquet
Julien Broquet Journaliste musique et télé

Sufjan Stevens a conquis Bozar avec un set de pratiquement deux heures nettement moins touchant que son splendide dernier album Carrie & Lowell.

C’est peu de dire que le concert de Sufjan Stevens jeudi au Bozar était attendu. Un nouveau disque somptueux et bouleversant, Carrie & Lowell, acclamé par le public et la critique. Un sold out réalisé en un claquement de doigt. Et un dernier concert en Belgique qui remonte à plus de quatre ans (c’était au Cirque royal pour le très kitschounet The Age of Adz)… Tout était réuni pour que l’excitation soit à son comble et que les retrouvailles se fassent triomphe.

Un triomphe auquel le natif de Detroit a eu droit. Ovationné par un public debout, acquis à sa cause et complètement sous le charme. Mais une consécration (une de plus) qui n’occulte pas chez nous une petite pointe de déception. Même en jouant l’intégralité d’un de nos disques préférés de l’année (pratiquement dans l’ordre d’ailleurs), un album à fleur de peau qui nous fait pleurer dans l’intimité, Sufjan ne nous a que trop rarement émus… C’est vrai. Il avait prévenu. Extrêmement chargé émotionnellement, Carrie & Lowell aurait sur scène une dimension moins plombée que sur disque. Le titre de l’album et son contenu font référence à sa maman décédée en décembre 2012, une femme dépressive, bipolaire et alcoolique qui s’est enfuie du foyer familial avant qu’il apprenne à marcher, ainsi qu’à son beau-père Lowell Brams.

« What is that song you sing for the dead? » Alors que défilent en arrière plan, sur de fins écrans verticaux, de vieux films de famille, Sufjan entonne le vibrant Death to Dignity et semble se parler à lui-même. Tristesse. Regrets (Should have known better)…

Quatre musiciens dont un batteur (il n’y en a pas sur l’album) et la jolie Dawn Landes (on ne peut que recommander aux fans du sieur Stevens et aux autres l’écoute de Dawn’s Music) vont et viennent, passent comme lui d’un instrument à l’autre. Une question de pudeur sans doute: l’Américain s’écarte de l’épure et de la beauté dépouillée qui hantent son disque. The Owl and The Tanager (All Delighted People EP) et Vesuvius (The Age of Adz) excepté, la première partie du concert lui est pourtant intégralement consacrée. Les vidéos carte postale de ciel, de mer et de falaises comme les arrangements laissent parfois perplexes. Sufjan ne pipe mot. Sort de scène sur le déluge qui clôt Blue Bucket of Gold… Il reviendra souriant, plus léger, comme libéré, avec le splendide To Be Alone With You (Seven Swans) et un rappel mettant à l’honneur son cher Illinois. Concerning the UFO Sighting Near Highland, John Wayne Gacy, Jr… L’incontournable Chicago achève une généreuse prestation de quasiment deux heures. Un bon concert manquant un peu de délicatesse, d’âme et de grâce.

SETLIST: Redford (For Yia-Yia & Pappou) / Death With Dignity / Should Have Known Better / Drawn to the Blood / Eugene / John My Beloved / The Only Thing / Fourth of July / No Shade in the Shadow of the Cross / Carrie & Lowell / The Owl and the Tanager / All of Me Wants All of You / Vesuvius / Blue Bucket of Gold // Concerning the UFO Sighting Near Highland, Illinois / Futile Devices / To Be Alone With You / John Wayne Gacy, Jr. / For the Widows in Paradise; For the Fatherless in Ypsilanti / Chicago

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