Rencontre avec YellowStraps, futurs incontournables électro-soul

Reboosté, le duo YellowStraps -Yvan et Alban- s'installe avec son nouvel EP. © Baudouin Willemart
Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

Depuis longtemps sur les radars, la fratrie YellowStraps sort enfin l’EP Goldress. L’occasion d’installer définitivement leur soul électronique, amoureuse et élégante.

Cela commence à remonter maintenant. La première fois que l’on entend parler de YellowStraps, cela devait être vers 2013 (le titre Pollen). Six ans plus tard, ils ont toujours l’air de jeunes débutants… « Les gens nous disent souvent qu’on ne fait pas notre âge », se marre Yvan Murenzi, moitié du duo qu’il forme avec son frère Alban. En vrai, le premier s’approche des 28 ans, quand le second vient de passer récemment le cap des 26. Alban Murenzi a d’ailleurs fêté son anniversaire le jour même de la sortie du nouvel EP, Goldress. Leur troisième. Celui qui devrait, enfin, faire passer la fratrie à la vitesse supérieure, mutant du statut de « groupe en développement », récompensé dès 2014 aux Red Bull Elektropedia Awards (Most promising artist), à celui d’incontournable électro-soul…

King cool

Au départ, c’est à Braine-l’Alleud que ça se passe. Quarante mille âmes à tout casser, dans le Béwé, à l’ombre de la butte de Waterloo. Et, aussi bizarre que cela puisse paraître, au milieu de l’ennui banlieusard, l’un des épicentres de la scène musicale francophone. C’est en effet par là, via le collège Cardinal Mercier, que passe une bonne partie de la fameuse scène pop-rock des années 2000 -Girls in Hawaii en tête. C’est aussi là, symboliquement, que se croiseront plusieurs acteurs de la « bascule » hip-hop. Comme par exemple Le Motel, alias Fabien Leclercq. « On était voisins, explique Yvan. Il était tout le temps fourré à la maison. D’ailleurs, au départ, Le Motel était un projet qu’il avait monté avec notre grand frère. Plus tard, en secondaires, on a aussi rencontré Roméo (Elvis, NDLR). »

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Avant cela, Yvan et Alban Murenzi sont nés au Rwanda, qu’ils quittent juste avant que le génocide n’éclate. Direction d’abord l’Ouganda – « on suivait notre père qui devait bouger pour le boulot »-, pour atterrir finalement en Belgique, en 2000. De ces racines africaines, YellowStraps n’en a pas gardé grand-chose. En tout cas, rien de musical. Quand Alban commence à gratter de la guitare, c’est sur Nirvana et les Arctic Monkeys qu’il s’exerce. « C’est Fabien qui m’a donné envie de m’y mettre. C’était le seul dans notre entourage qui jouait d’un instrument, je trouvais ça très intrigant. » Le cadet de la famille se lance donc à son tour et passe son temps libre à disséquer les vidéos live de ses groupes rock préférés. Jusqu’au jour où, avec Yvan, ils tombent sur l’Anglais King Krule. « Il nous a véritablement retourné le cerveau. Il devait avoir à peine seize ans quand il a balancé ses premiers titres. Tout à coup, je découvrais des accords jazz plus complexes. Je me suis enfermé dans ma chambre pour étudier tous ses plans. »

Du côté d’Yvan, c’est la batterie qui l’attire davantage. « J’avais quatorze, quinze ans, j’en ai fait pendant six mois, ça m’a vite saoulé (rires). De toutes façons, je savais bien que je n’allais pas pouvoir en jouer à la maison, c’était beaucoup trop bruyant pour mes parents, qui avaient toujours peur qu’on dérange les voisins. » Au point d’établir une hypothèse: et si c’était là l’explication du côté très feutré de la musique de YellowStraps, et de leurs mélancolies amoureuses laidback? « Dès le départ, on a travaillé avec beaucoup de nappes, d’effets reverb’. Même quand on enregistrait les voix, il ne fallait pas faire trop de boucan. »

Rencontre avec YellowStraps, futurs incontournables électro-soul

Au départ, le projet reste encore très orienté pop/rock -jusqu’au blaze du groupe, les « lanières jaunes », qu’Alban et les autres membres du groupe avaient achetées pour attacher leurs guitares. Yvan: « J’ai proposé le nom un soir au souper, comme une blague évidemment. » Sauf qu’en anglais, cela sonne plutôt bien. Il est adopté. Les lanières en question sont d’ailleurs toujours accrochées. La musique, elle, a muté. Yvan: « Ça faisait un moment qu’on voulait faire un morceau avec Fabien, qui était passé à des productions plus électroniques. Finalement, un jour, on s’est donné 24 heures pour composer, enregistrer et clipper un titre ensemble, avec l’idée de combiner nos deux univers. » Le morceau s’intitule Pollen. Il est fondateur. D’autant plus qu’il se retrouve rapidement repris dans la playlist du très écouté DJ Lefto. On est au printemps 2013. Roméo Elvis vient lui-même de sortir son premier projet (Bruxelles, c’est devenu la jungle). Tout ce petit monde va évoluer et grandir ensemble.

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En 2018, par exemple, quand YellowStraps sort son EP Blame, Yvan et Alban se retrouvent invités par Roméo sur le plateau de Planète Rap. Un joli coup de pouce pour accompagner une sortie qui doit marquer le coup. En l’occurrence, il marque surtout un coup… d’arrêt. Alban: « Le problème, c’est ce que tout est vite retombé, alors qu’on aurait dû avoir un plan pour réattaquer directement juste derrière. » YellowStraps se retrouve au point mort…

« Et puis, à la fin de l’année, je m’en souviens très bien, on a passé le réveillon ensemble, chez un pote. On s’est tous les deux dit qu’il ne fallait pas lâcher, que tout était là, qu’il suffisait juste de se remotiver. » De fait, quelques semaines plus tard, programmés au festival Eurosonic, ils dégotent un nouveau manager. Au printemps suivant, ils se retrouvent invités à Berlin pour enregistrer une session Colors, dont les vidéos sur YouTube sont devenues parmi les plus influentes du show-biz musical. Aujourd’hui, la fratrie reboostée sort l’EP Goldress. Non sans ironie, il commence avec les mots: « What took you all this time? »

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Après s’être un peu dispersé en route, YellowStraps a donc aujourd’hui un plan. Et un label en Angleterre -pour une musique qui sonne en effet très British (pensez King Krule, Mount Kimbie, James Blake). L’écriture, aussi, a été repensée, plus proche du format couplet-refrain. Même si le thème général, lui, n’a pas trop changé. « Les relations amoureuses, avec tout ce que ça peut comporter de tourments, sourit Yvan. Ça peut sonner un peu mielleux, dit comme ça. Mais je n’y peux rien, j’y reviens tout le temps. On a toujours vu nos parents ensemble. Du coup, je me demande toujours comment on peut aimer un jour, puis voir tout ça s’évanouir complètement. » Vaste question…

YellowStraps, Goldress EP, distr. Haliblue. ***(*)

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