Pukkelpop J2: Grandaddy fait de la résistance

© Noah Dodson
Nicolas Clément
Nicolas Clément Journaliste cinéma

Groupe indé culte du début des années 2000, Grandaddy, fraîchement reformé, n’a peut-être jamais été aussi bon que vendredi dans le Marquee du Pukkelpop.

La légende raconte que le groupe doit son nom à une gamine qui, ayant assisté à l’un de ses tout premiers concerts, trouvait que Jason Lytle ressemblait à son grand-père. Toujours est-il que quelques années plus tard, à l’aube des années 2000, ce jeunot au look de vieux sort avec Grandaddy l’étourdissant The Sophtware Slump, manifeste de pop mille-feuille d’une ampleur que les bricolages lo-fi, merveilleux au demeurant, de Under The Western Freeway, album de la révélation en 1997, ne laissaient en rien augurer. Le landerneau indie de la décennie qui suit ne s’en remettra tout simplement jamais, ses plus fiers représentants se cassant les dents les uns après les autres, à de rares et miraculeuses exceptions près (Midlake, Flotation Toy Warning…), sur les sommets proprement himalayens de cette odyssée bucolico-cybernétique touchée par la grâce. Le groupe lui-même, une bande de skaters grassouillets à barbes, portant négligemment casquettes de truckers et chemises à carreaux de bûcherons, ne rééditera jamais son exploit, revisitant sans génie ses gammes le temps de deux albums, certes loin d’être honteux, avant de splitter. Fin de l’histoire.

Sauf que non. En mars dernier, un communiqué annonce que le groupe de Modesto sacrifie à son tour à la mode des reformations et reprend la route des festivals. Grandaddy fait de la résistance, donc. Fausse bonne nouvelle? Peut-être. Jason Lytle, visiblement ému par l’ovation survoltée qui lui est réservée vendredi soir dans le Marquee, ne dira d’ailleurs rien d’autre en fin de concert: « L’espace d’un instant, on s’est dit que cette histoire de reformation était une idée à la con. » Avant d’ajouter: « Merci de nous avoir prouvé que nous avions tort.« 

Mais à l’instar du clip de « Yeah » Is What We Had, projeté parmi d’autres sur un écran géant en fond de scène, il s’agirait de ne pas passer le film à l’envers. On rembobine. Vendredi 19h30 dans le Marquee, donc. Lytle & cie déboulent au son du générique de Welcome Back, Kotter, une vieille série télé seventies où Travolta a fait ses classes: « Welcome back to that same old place (…) Welcome back, welcome back, welcome back. » Comme ça, c’est dit. Jason Lytle, presque rasé de près, siffle du rouge à même le goulot, et donne le coup d’envoi de ce qui ressemble bientôt furieusement à un concert best of: El Caminos In The West, Now It’s On, The Crystal Lake, A.M. 180, Chartsengrafs, Hewlett’s Daughter

Il y a bien, çà et là, l’un ou l’autre raté (le final, un peu brouillon, sur He’s Simple, He’s Dumb, He’s The Pilot, sublime ballade marathon aux accents épiques) mais ça fonctionne. Ca fonctionne même très bien. Et sur le tubesque Summer Here Kids, ça cartonne même franchement. La formule, magique, est pourtant peu ou prou toujours la même: synthés cheap sur guitares poids lourds, pop rêveuse sur rock qui tache. Sans surprise, peut-être, mais foutrement bon. Et puis la musique et les mecs de Grandaddy -mention spéciale au batteur, sorte de Bouli Lanners du bayou- ont toujours eu le chic pour dégager ce je-ne-sais-quoi qui fait la différence. Un supplément d’âme, on va dire ça. Alors ouais, welcome back les mecs, carrément.

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