Nokao: le festival de hip hop se transforme en braderie

© Jessica Matthys

Pour sa 3ème édition, Nokao, le festival de hip hop, revient avec une nouvelle formule: une braderie vintage. Rival, son créateur, invite à ne plus fermer les yeux sur l’existence d’une culture bien ancrée chez nous.

La première édition de Nokao, le festival des Cultures Urbaines, a eu lieu en 2009, avec l’idée de mettre à l’honneur la culture hip hop et son histoire, d’améliorer son image négative et permettre à qui le souhaite de s’y initier par des animations variées. Au menu: concours hip hop, ateliers de slam, de graffitis, danse et expos pour valoriser les créations d’artistes belges. Un concept qui a tout pour plaire. Et cette année, une semaine avant le retour du festival, on nous annonce que Nokao se présentera sous une nouvelle forme. Bref, c’était l’occasion d’aller y jeter un oeil.

« Ça ne s’était pas encore vu »

Ce samedi, le marché « B.B.M hip hop » prend place dans un genre de grand hangar vide, rue Dieudonné Lefèvre à Bruxelles. Premier bon point, l’entrée est gratuite. Et quand on entre, c’est au son des beats de DJ Khéops (IAM) qu’on est accueilli. La braderie, modeste, propose néanmoins de tout : baskets, t-shirts, sweats, en passant par les vinyls, CD, et DVD. L’association Lezarts Urbains a elle aussi son stand, et propose des ouvrages pour comprendre la culture urbaine et s’initier au hip-hop, au rap ou au slam. Au fond de la salle, quelques maîtres du graffiti sont en pleine démonstration pour le plaisir des curieux, durant plusieurs heures (pour le résultat final, il faudra rester jusqu’au bout). Un coin cuisine et un van transformé en snack sont à disposition des visiteurs ainsi qu’une « expo » (une dizaine de peintures affichées) et un stand maquillage pour les plus petits. L’animation de la journée est confiée à N’Gie, animatrice radio, plutôt enthousiaste: « C’est la première fois que ce genre de marché se fait à Bruxelles. Il y a plusieurs stands, des jeunes viennent faire la promo de leur albums… Il y a un vrai échange, et ça, ça ne s’était pas encore vu. » Plus loin, un père venu avec ses deux enfants, explique: « J’encourage ce genre de projet car c’est important que les artistes puissent voir leur travail exposé, valorisé, qu’on les prenne au sérieux, et pas pour des voyous. Et puis l’endroit est grand, inattendu. Je me demande pourquoi ils n’ont pas fait ça plus tôt! Je pense que les organisateurs ont de chouettes idées, maintenant il faut que les autorités y mettent du leur. »

Assis autour d’une table avec des amis, un autre visiteur salue l’initiative, mais reste sceptique quant à l’évolution de l’image du hip hop. « C’est dommage qu’il n’y ait pas plus de jeunes: la génération du hip hop est un peu veillissante. J’ai l’impression que le festival se veut être une forme de reconnaissance pour eux mais que les jeunes ne reconnaissent plus ce monde là, et ne viennent plus. Il y a un paradoxe. Le hip hop d’il y a 15 ans ne se vit plus de la même façon, je pense. »

Le hip hop, « un exutoire pour les gens »

Celui à la base du B.B.M, c’est Rival (leader du groupe CNN199). Il est là, et veille discrètement au bon déroulement des choses. Il raconte la genèse du projet. « Quand on organise des évènements [ici avec Prohibe et Souterain prod, qui produisent], on essaye toujours de mettre le doigt sur ce qui n’a pas encore été fait. Le B.B.M, c’est d’abord un nom dans les deux langues, français et néerlandais (Brocante-Braderie-Marché/Market), pour s’ouvrir à plus de monde. » Ensuite, c’est l’occasion de rendre au monde du hip hop sa juste valeur. « Un vinyl ou CD qui coûterait 1 euro chez Pêle-Mêle coûte 5 ou 10 euros ici, selon sa rareté ou son contenu. C’est donc une façon de redonner de la valeur à ces objets, valeur perdue à travers le temps. » Pour Rival, ce marché est aussi un prétexte pour la rencontre. « Après plus de 28 ans de culture hip hop, les adeptes ont beaucoup à partager. Les anciens breakers, graffeurs encore actifs s’adressent aux plus petits qui viennent découvrir. » Pense-t-il que la culture urbaine est suffisament reconnue en Belgique? « Il y a de plus en plus de politiques qui nous suivent et qui répondent à notre appel. Aujourd’hui, il ne faut plus se voiler la face ni faire semblant: la culture hip hop est là, bel et bien implantée en Belgique. C’est une source de métiers, de créations et un exutoire pour beaucoup de gens. »

Membre du groupe marseillais IAM et ami proche de Rival, DJ Khéops envoie du son depuis le début de la journée. Il est aussi ravi que le projet voie le jour. « Chez moi, je ne crois pas que la mairie de marseille donnerait de l’argent pour organiser ça! L’idée est super, il faudrait que ça devienne quelque chose de plus grand dans quelques années, que ça se fasse dans d’autre pays européens. » Un festival de renommée européenne? On en est encore loin. Mais Rival, lui, espère d’abord pouvoir relancer la braderie tous les 6 mois. En l’animant avec les même 3 disciplines: musique, graffiti et breakdance. « Le but est surtout que les gens s’amusent, et puisse venir gratuitement. »

Reste à attendre les prochaines éditions, pour voir si le concept rencontre le succès…

J.M. (stg)

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