Nicolas Michaux: « J’aime l’idée de faire beaucoup avec peu »

Nicolas Michaux © Vanoverberghe
Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

Quatre ans après la fin de l’aventure Été 67, il revient avec un premier album solo épatant, trouvant sa voie dans une chanson-variété au charme bio, délicieusement décalé.

Il fut un temps où Nicolas Michaux avait la barbe nettement plus fournie. Vous vous en souvenez peut-être: c’était quand il officiait au sein d’Eté 67, feu de paille chanson-folk liégeois -deux albums, dont le joli succès du premier disque éponyme (16.000 ventes). Le chanteur du groupe arborait alors une pilosité folkeuse qui pouvait lui donner des airs de Crusoé. Aujourd’hui, le poil est toujours là mais ne dépasse pas les quatre jours: « Tu sais bien que les îles désertes n’existent plus », annonce Nicolas Michaux sur son premier album solo… Le disque en question s’intitule A la vie, à la mort, et débute par le morceau Nouveau départ. Puisque c’est en effet bien de cela qu’il s’agit.

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Il n’y a pas d’âge pour faire une crise de la quarantaine. Quand elle lui est tombée dessus, Nicolas Michaux par exemple n’en avait pas 30. Les premières crispations datent de 2010. Cette année-là, Eté 67 sort un second album. Son dernier. Le morceau-titre Passer la frontière l’annonce déjà: il va falloir se « résoudre aux adieux ». Le groupe est bel et bien dans l’impasse. « La situation était devenue étriquée. Le disque a « marchouillé », et pour continuer, il aurait fallu réinjecter énormément d’énergie. Puis il y avait également quelques dissensions musicales: tout le monde n’était plus sur la même longueur d’onde, et je me retrouvais parfois un peu entre le marteau et l’enclume… On a réalisé une dernière super tournée au Québec, en plein coeur de l’hiver. Après le concert à Montréal, on s’est mis d’accord pour faire une pause, en ne sachant pas si on allait se remettre ensemble. »

Groupe de potes, lancé au lycée, Été 67 en restera là: « Une histoire d’amitié adolescente immaculée, qui a fait son temps. » Fini les teenage years. Un diplôme en poche (Histoire à l’ULg), mais désormais sans groupe, Nicolas Michaux a un boulevard devant lui. Mais pas de vrai plan. « Non, en effet » (rires). Pas grave, la vie se chargera de lui en trouver un. « J’ai rencontré une fille, on est tombé hyperamoureux. J’ai cassé plein de choses à Liège, et je suis parti un an au Danemark. » Puisque, on l’a compris, l’héroïne est danoise et doit retourner au pays terminer ses études. Aujourd’hui, « on est toujours ensemble. » Un beau roman, une belle histoire…

Décroissance pop

Pendant un peu moins d’un an, Nicolas Michaux vit donc à Aarhus, deuxième ville du pays, au bord de la mer. Une parenthèse idéale pour bouquiner, flâner, se laisser vivre et faire le point. Ou pas. « Après un mois ou deux, j’ai commencé à avoir envie de refaire de la musique. Je n’avais pas pris grand-chose avec moi, juste deux guitares. Alors, en allant à Hambourg, j’ai acheté un clavier. Au fil du temps, je me suis recréé un tout petit set-up, avec notamment un enregistreur H4 (pour faire court, un gros dictaphone, NDLR), que j’utilisais comme carte-son, et dans lequel je branchais des petits micros, des trucs comme ça… » Less is more, comme dirait l’autre. Dans la limitation des moyens, Nicolas Michaux s’offre ainsi un nouveau souffle, un nouvel élan. « C’est comme si je m’étais trouvé artistiquement. »

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Quand il revient en Belgique, il laisse Liège définitivement derrière lui et s’installe à Bruxelles. Au même moment, il reçoit l’opportunité de partir deux semaines à Kinshasa. Il y chope de nouvelles amitiés (le musicien Rodriguez Vangama, présent sur l’album) et la conviction que la musique ne sonne décidément jamais aussi bien que quand elle se décline au naturel, au plus près de la vie et du quotidien. Alors quand, quelques mois plus tard, il pond d’une traite Nouveau départ, il a enfin la confirmation qu’il y a quelque chose à faire avec tout le matériel sonore ramené d’Aarhus. « Je savais que je devais me mettre dans les conditions pour aller jusqu’au bout de mon idée. Cela impliquait par exemple de fuir les studios classiques, avec la pression du temps qui court, du budget qui file. » Nicolas Michaux s’achète donc du matériel pour s’enregistrer directement. Il contacte également Julien Rauïs, ingé son du groupe bruxellois Great Mountain Fire, avec lequel il a déjà bossé. Ils partagent le même goût de la lenteur, du home made, et de l’artisanat qui permet de créer « des moments de vie ».

Petit à petit, le puzzle se met en place: le disque se monte à quelques-uns, à coups de sessions de deux, trois jours, improvisées dans des baraques à gauche et à droite. Quitte à ce que cela flotte parfois –« cela a pu être en effet un peu chaotique », glisse l’intéressé dans un sourire entendu. Peu importe. Le résultat est aussi important que la manière: intime –« j’ai souvent pensé aux premiers albums solos de McCartney et à leur parti pris très domestique »-, voire personnel: « Nicolas Michaux, c’est un peu passe-partout, mais c’est mon nom, et je ne me voyais pas inventer un pseudo pour présenter des chansons que j’ai voulues les plus honnêtes possibles. »

Un peu à la manière d’un Mathieu Boogaerts, Nicolas Michaux se pose comme adepte d’une certaine économie des moyens. « J’aime l’idée de faire beaucoup avec peu, comme une sorte de décroissance pop. » Bourrée de vieux synthés Casio bancals, sa musique n’en est pas rachitique pour autant. Après tout, intimité ne veut pas dire forcément nudité, pas plus que la modestie n’est synonyme de dénuement -voir les 7 minutes des Iles désertes ou le joli foisonnement afropop de Part of No Part.

Animal solo incapable de se passer du collectif, Nicolas Michaux trace une jolie route entre chanson, rock et variété synthétique, toujours un peu en décalage. « Disons que j’essaie de faire de la musique traditionnelle belge de 2016. » Ecouté et approuvé.

NICOLAS MICHAUX, À LA VIE, À LA MORT, DISTR. TÔT OU TARD/PIAS. SORTIE: LE 8/04. EN CONCERT NOTAMMENT, LE 15/04, AU BOTANIQUE.

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