Mountain Bike, les gamins au vélo
À l’heure de la confirmation et d’un redoutable deuxième album poppy et nineties, les grands gamins de Mountain Bike nous promènent dans Bruxelles. Le fil de la course…
Avis de tempête, vents violents pouvant souffler jusqu’à 90 km/h et fermeture préventive du bois de La Cambre. On avait prévu de se promener dans Bruxelles à vélo avec les Mountain Bike (vélo-mountain bike, tu saisis?). On l’a finalement fait en Fiat Panda. Avec dans le coffre la bécane qu’on avait prévue pour le plus petit chanteur de la scène rock belge. Sur Too Sorry for Any Sorrow, le groupe franco-bruxello-tournaisien assume avec succès et sans complexe sa sensibilité pop et zigzague entre Blur, Pavement, Grandaddy, Mac DeMarco et Fountains of Wayne.
1. Ice Ice Baby
Mountain Bike: « Ici, c’est notre local de répète aux Glacières de Saint-Gilles. On le partage notamment avec La Muerte et La Pince. Il y a une chiée de groupes qui s’entraînent dans ce complexe. Ça fonctionne à horaires fixes. C’est un peu contraignant. Mais on s’est habitués à son confort. Parfois, c’est galère. Les BRNS ont bossé pendant des années dans un truc miteux avec des champignons aux murs, le plancher qui s’écroule… »
Charles-Antoine (batterie): « La plupart des morceaux naissent ici mais on a tellement tourné qu’on n’y était plus très souvent. »
Aurélien: « En termes de son, on a voulu quelque chose de plus digeste. Un disque qui pourrait sonner relativement bien partout. Le premier album était plus agressif. Plus carré. »
Étienne (voix, guitare): « Certains morceaux convenaient bien à des arrangements calmes et posés. Au lieu de les crader, on a essayé de les faire sonner correctement. »
Stefano (basse): « On a évolué. On a donné au total plus de 150 concerts. On a fait des résidences. On se permet des choses plus recherchées que, perso, je n’aurais au début même pas été capable de jouer. C’est facile de mettre un truc bourrin quand tu ne sais pas comment terminer un morceau. »
Aurélien (guitare): « Graham Coxon, c’est une grosse influence dans mon jeu de guitare électrique. Pavement c’est mon truc aussi.Étienne, Charles et Stef viennent des sixties, du garage. Mais moi, j’ai toujours eu des inspirations clairement nineties. C’est marrant que le disque ait ce côté nonchalant. Ça ne correspond pas du tout à son enregistrement. On a été très consciencieux. Là où le premier reposait plutôt sur l’énergie. »
Étienne: « Les textes aussi sont plus soignés. Plus personnels. J’ai travaillé avec des Anglophones. Elles m’ont proposé des choses, m’ont également confronté à la réalité. Sur le premier, je faisais du franglais. C’était un peu n’importe quoi. »
Aurélien: « Ça participe aussi à cette volonté d’avoir un son plus clair. On avait moins peur de foutre les textes en avant, sans effet. Que tout soit intelligible. »
2. Durty talk
Étienne: « Je connais très bien Elzo (Durt) qui va sortir avec Humpty Dumpty l’album sur son label Teenage Menopause. On n’arrivait pas à s’en trouver un pour notre groupe Warm Toy Machine. Et en deux semaines, il nous a mis en contact avec des Allemands qui allaient distribuer nos deux disques. Puis, il nous a fait l’image. Ne nous a même pas demandé de fric pour la peinture. Il a de qui tenir. Son père lance des pogos aux concerts et monte m’embrasser sur scène au Magasin 4. Elzo est hyper actif, super curieux. Le genre de type qui t’ouvre des pistes. C’est important de rencontrer des gens comme ça quand tu arrives sur une ville comme Bruxelles. Les punks qui écoutent de la techno, tu vois pas spécialement ça dans le Sud. Par contre en soirée, Elzo, il est destroy. Je tiens pas la distance. »
Elzo: « On pensait déjà sortir le premier album mais on a un peu merdé. Les démos étaient plus tendues. On a reçu le disque. On a été un peu déçus. On s’est mal compris. On a regretté et on s’est dit qu’on rattraperait le coup. C’est cool pour eux aussi. Ça va leur faire davantage d’ouverture et de visibilité sur la France. Ça a vachement changé depuis le départ, leur truc. Ça s’est« proprifié » et ça leur va bien avec des sonorités très nineties. C’est super bien foutu. Normalement dans notre catalogue, ça s’intercalera entre Xiu Xiu et le Prince Harry. »
3. God is a DJ
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Étienne: « C’est ici, 17 rue des Renards, au milieu des meubles et antiquités, que j’achète pas mal de mes vieux disques. Je jouais déjà les DJ’s à Toulouse dans un bar qui s’appelle Le Saint des Seins. J’y ai appris à faire danser les gens avec du rock’n’roll et de la soul. En Belgique, chez Madame Moustache, on m’a proposé le concept des mercredis sixties. Mixer, ça permet de jeter un autre regard sur le passé. Je ne suis pas un avant-gardiste, mais un nostalgique. Je bosse comme barman chez Franz et Eric le proprio du maga habite juste au-dessus. Les Marolles, c’est le quartier où j’ai passé pas mal de mon temps en arrivant à Bruxelles. On y a tourné une bonne partie du clip de This Lonely Place… »
Stefano: « On n’a pas vraiment d’identité visuelle. On part un peu dans tous les sens. Mais il y a toujours cet humour et cet esprit déconneur. On a tout le temps gardé nos tafs. On se faisait même davantage d’argent quand le groupe n’existait pas. On ne devait pas prendre deux jours de congé pour donner un concert. Si on commence à se dire que Mountain Bike sert à gagner du fric, on est perdus. Tu fais ton premier gig et tu te dis: allez, ça c’est pour le loyer. Allez, le deuxième, c’est pour la bouffe… C’est horrible. Faut vraiment pas tomber dans ce piège. Au mieux, maintenant que tout est déclaré, on va chercher 300 balles chacun par mois grand max. »
Aurélien: « Sans tomber dans la philosophie de comptoir, c’est un peu comme dans le monde, tu as des écarts sociaux assez dingues. Tu as des choses qui marchent. D’autres qui marchent mieux. Certains récoltent beaucoup. D’autres très peu. Entre deux slots de festivals, tu as des écarts de plusieurs dizaines de milliers d’euros. »
Charles-Antoine: « Faut se dire qu’on est plutôt bien lotis. On a des potes qui galèrent dix fois plus que nous. On ne fera jamais une carrière mais on est quand même plutôt chanceux. Mountain Bike, c’est pas un projet viable. Tant que tu as l’énergie, le temps, les copines compréhensives, c’est cool. Mais une fois que tout ça s’éteint, tu dois revenir à la réalité. »
4. La fête à la maison
Aurélien: « Dans cette coloc que je partage notamment avec Charles, on paie chacun notre chambre et celle-là, c’est la mienne même si j’y dors pas. L’idée c’était d’avoir ma pièce de musique et d’être autonome. De ne pas devoir emprunter un micro par ci un préampli par là. Au départ, c’était juste pour moi ce matos. Quand Mountain Bike a commencé, j’avais à peine deux micros. Depuis, j’ai travaillé avec Italian Boyfriend, Shoeshine, Endz, Baya Computer… On a enregistré des voix ici mais la majeure partie du disque à Rumes chez les parents de Charles, en septembre 2015. «
Stefano, Étienne, Aurélien: « Un accueil formidable. La nourriture est bonne. La piscine est agréable. Le père a un bon cubi de rouge et il remplissait en plus toujours le frigo de bières. »
Charles-Antoine: « Ouais, il est marrant. Il vient comme ça avec les mains dans le dos de temps en temps. Il regarde un peu les ordinateurs. « C’est pas mal hein? »… »
Aurélien: « On a fait le gros du disque dans une espèce d’ancienne écurie. Enregistré des batteries dans une petite chambre. On a eu le temps de trouver là où on voulait aller. »
Charles: « L’album s’est aussi vraiment révélé au mixage. Staf Verbeeck (BRNS, Metal Molly, Madensuyu, Selah Sue…) a pu mettre de la technique sur les idées d’Aurélien. D’ailleurs, tu peux dire qu’on a compressé les batteries sur du matos d’Abbey Road qui aurait été utilisé par les Beatles. »
Aurélien: « Il l’a racheté à Mark Knopfler, enfin au gérant de son studio. On n’est pas fan de Dire Straits, hein. Mais c’est marrant. On a aussi bossé au studio Pyramide et chez les Double Veterans. Au Hightime Studio. Un chalet de jardin près de Westerlo. »
5. Gray’s anatomy
Étienne: « C’est dans ce quartier, rue Gray, que je me suis installé avec Stefano et son frère en arrivant à Bruxelles. On vivait au-dessus d’un ancien garage. Avant nous, ça s’appelait la Spbarak et c’était déjà un lieu d’expos, de concerts, de teufs. Un jour, ils ont trouvé un de leurs potes mort. Il avait oublié ses clés et était tombé d’un muret en essayant de rentrer. Nous, on a débarqué en 2009. On y a organisé six ou sept concerts dont Jack of Heart. On y répétait aussi. C’est même là qu’on a enregistré notre premier 45 tours. On a quitté quand le proprio a vendu l’immeuble. Les gamins du quartier me traitaient de sale français et juste à côté il y avait le pont des suicidés. J’ai quand même vu deux personnes qui s’en étaient jetées. Mais on n’a jamais eu d’emmerdes. On y a même fait dormir Ty Segall après un concert chez Moustache. »
Too Sorry For Any Sorrow, distribué par Humpty Dumpty/Teenage Menopause. ****
Le 10/03 au Water Moulin (Tournai), le 25/03 au Reflektor (Liège), le 06/05 aux Aralunaires (Arlon) et le 20/05 au Cirque Royal.
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