Mirano, le bénéfice du doute

Night in Night out, épisode 15: spécial réouverture du Mirano. Guillermo Guiz, en veilleur de nuit, y était forcément. Impressions.

Ca commence par l’impuissance d’un Dafalgan. Là, maintenant. Night in Night out, ou comment écrire avec un match de squash dans le crâne. Le jeu, cela dit, en valait et en vaut la chandelle. La nuit passée, le Mirano créait l’événement en offrant à la face de Bruxelles son nouveau visage de MILF toute refaite. Passée chez McNamara/Troy, la légende nocturne de la chaussée de Louvain! « Tell me what you don’t like about yourself, Miss Mirano ».

Ben c’est simple, doc: mes deux ou trois derniers concepts se sont viandés façon Renmans et l’autre là, le milieu de la nuit, fait qu’à dire, je cite: « Le Mirano est une vieille pute sur laquelle tout le monde est déjà passé ». Alors, moi, ce que je veux, c’est pas une injection de botox, c’est un taf au biseau. Moi, ce que je veux, carrément, c’est une cure de jouvence, la jeunesse éternelle, l’immortalité, je veux que les noceurs de 2140 m’arpentent et me besognent à l’ancienne, comme dans les eighties, comme dans les nineties, comme dans les deux-milleties.

Sacré Mirano… C’est comme les bougies surprises, t’as beau souffler dessus, ça se rallume. Encore et encore. Et encore et encore. Pourtant, cette nouvelle renaissance a ceci de singulier qu’elle marque l’adieu, un peu snifant et coulant du nez, du Mirano tel que ses inconditionnels l’ont connu. Après trente années de gestion, Paul Sterck le mythique, le clairvoyant, sorte de Bruno Coquatrix à la bruxelloise, a finalement lâché son jouet. Un peu fatigué, probablement las, le regard embué. Si tu le croises en rue, l’allure bonne vivante et malicieuse, tu croiseras l’âme du Mirano. Cet esprit festif, créatif, explosif, bourgeois décadent, show-bizien qui, des grandes périodes de DJ Jean-Claude au duo Lorenzo Serra-Cosy Mozzy, en passant par Carl de Moncharline, a écrit la légende de l’ancien cinéma. Cette nuit, la question que j’ai posée ou qu’on m’a posée cinquante-six fois, le « alors, t’en penses quoi? » de rigueur, avait la saveur triste des fins de cycle avec Paul Sterck en interlocuteur. Comme un pincement au coeur. « Joker », m’a-t-il répondu, pudique. The show must go on.

J’étais perplexe. Et pas le seul à l’être. Pas forcément parce que les formules après-Dirty (clap fin en juin 2009) s’étaient toutes fracassées les dents sur l’indifférence généralisée des clubbeurs locaux. Mais plutôt parce que la nouvelle équipe, celle du Spirito Martini, me laissait songeur, circonspect, un peu interdit. Au minimum. Difficile, en effet, d’imaginer que l’esprit Mirano puisse rejaillir des mains bling-bling de Fabien Feys et Francesco Ravo. Show-off à outrance, VIP toute, musique commerciale, ambiance feutrée: aussi majestueux soit-il sur le plan esthétique, le Spirito Martini, succès public et financier incontestable, se profile en effet comme l’exacte antithèse du Mirano version Dirty Dancing, ce concept où j’ai passé tellement de temps, sur la fin, qu’on aurait pu m’y installer une couchette. Un temps béni (hill). Même si le Libertine Supersport a brillamment pris la relève (élu « Meilleur club en Europe » par le magazine Trax quand même…), le Dirty Dancing restera probablement gravé à jamais dans mes semelles.

« On ne fera pas un Spirito bis. On gardera l’esprit du Mirano, pour y faire une vraie boîte de nuit où tous les genres se rencontreront », m’avait confié, début de semaine, Fabien Feys. Et jusqu’à preuve du contraire, on ne peut que lui laisser le bénéfice du doute. D’autant que la nouvelle direction s’est entourée, en la personne de Junior Jack, d’un directeur artistique à la renommée house internationale. Même si on n’entend plus trop parler de lui dernièrement, Junior Jack (E Samba, Thrill me, Da Hype, Stupidisco…), c’est un peu l’Armand Van Helden version pizza-frites: de la redoutable house mainstream, efficace en diable.

Avec lui, Vito Lucente (de son vrai nom) amènera le son house du label anglais Defected, l’un des plus illustres de sa catégorie. J’ai entendu : « Qui veut encore écouter de la house à Bruxelles? » « Franchement, on a besoin d’une boîte house dans l’océan des clubs electros. » « Defected? J’y crois pas une seconde. » « C’est la marche du temps, tout le monde veut des clubs comme ça en ce moment. » Et cætera. En gros, la question divise solidement. Mais franchement, si la musique poursuit sur sa lancée d’hier soir, une lancée agréablement digne, y’a aucune raison pour que la sauce ne prenne pas.

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Après, faudra remplir… Week-ends après week-ends. Le vendredi en free pass, le samedi à 10 euros. Deux soirs où l’espace, immense, devra trouver qui l’occuper. Pas compliqué de blinder une inauguration (petits fours, open bar jusque 23h), surtout quand l’inauguré porte le nom qu’il porte. Et que tout Bruxelles by night a la curiosité à fleur de string. Mais en repeignant les murs en blanc et en aérant complètement les deux plateaux, Francesco Ravo et Fabien Feys ont pris le risque de « faire vide » quand il y aura moins de monde. Dingue comme le blanc change le Mirano. Dingue comme le côté glauque, vintage et flamboyant de l’ancienne mouture me manque. J’ai mis une demi-heure à m’en remettre. Et toute une soirée à me faire une opinion. Sans parvenir à la ciseler complètement.

La musique? Nikel, pour qui aime la house. Le public? Forcément m’as-tu-vu hier, parce qu’une bonne partie de la clientèle à cigares et champagne du Spirito avait fait le déplacement, plus à peu près tous les acteurs du monde de la nuit, plus les bombo-biches « t’as vu ma robe qu’elle est jolie? », plus la troupe habituelle des chacals qui vont avec, plus Laurent Haulotte (en l’absence de JMZ, mais en présence du cultissime Patrick « Dites-nous tout » Vermeire), plus tout Bruxelles.

Nouveauté: le coin VIP bien en évidence, surélevé là où se tenait l’ancienne scène du fond. Nouveauté: les ptits filous se sont entourés des barmaids les plus jolies de la ville. Nouveauté: je ne les ai pas collées. La déco? Des bars cassés et reconstruits, du blanc et or pour les couleurs, des formes plutôt souples et épurées, du tapis plein par moments (drôle d’idée, faudra un aspirateur Power Ranger), un mur de leds au fond de la salle, une cage d’oiseau sur la piste tournante, des demi-cages à gogos aux murs, un côté à la fois classe mais kitsch (à l’étage notamment, où d’étranges gradins à biture ont été installés), un côté Mirano et plus du tout Mirano. Sincèrement, je n’arrive pas à trancher.

Dans mon carnet: « 22h00. Mirano: le choc. 22h01: z’ont supprimé le Café Dirty. 22h02: salauds! 22h04: ça a de la gueule. 22h12: quand tu installes des fauteuils blancs partout, c’est que t’as pas envie qu’on rentre en casquette (?). 22h30: ambiance cocktail géant. 22h40: première gogo masquée toute en plumes. 22h47: premier cigare d’un type chauve. 00h26: le taux de mouvement est à 0,02 sur l’échelle d’Annie Cordy. 3h46: ça se vide, l’étage est fermé, mais y’a une serveuse avec un tatouage sur le sein. » C’est passé vite. Me suis plutôt bien amusé.

En clair, faudra voir sur la durée. Dès ce soir d’ailleurs, si t’es chau(e). Un club fixe, le vendredi, c’est plutôt une bonne nouvelle. Cela dit, ce vendredi, la capitale bougera pas mal avec deux ou trois soirées qui devraient valoir la peine. Faudra aller voir si Tom Barman et John Stargasm me contredisent et jouent proprement dans une Anarchic fort attendue, faudra mettre ses plus beaux habits de coquinou pour la soirée La Perla au Spirito, et s’éclater un peu plus à la cool à la Bodega, pour la No Party for Old Men, avec quelques chouettes DJ’s en guest. En parlant de chouettes DJ’s, c’est surtout demain que ça va pétarader des briques avec l’immense Laurent Garnier au Fuse et le très prometteur Nicolas Jaar, invité par le tout bon concept Catclub, sans compter la première Defected in the house au Mirano, la soirée FM Brussel au Libertine et les résidences habituelles. Du grain à moudre.

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Bon, en ce qui me concerne, après un excellent mais harassant mercredi au Wood, pour le première anniversaire de la soirée Celebrity (à faire, le mercredi au Wood, vraiment), et un jeudi tout aussi lointain, il est temps de te dire, à l’heure où les grands fauves ont déjà bu: à la semaine prochaine. Vais pioncer. Rideau.

Guillermo Guiz

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