Les 10 Days Off menacés?

© Dlux Fotografie/10 Days Off
Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

Lundi, les 10 Days Off mettaient un point final à leur 18e édition avec DJ Harvey. La dernière du festival électronique gantois, faute de subsides?

On hésite. Tête de pirate ou allure de hippie revenu de Goa? Sosie émacié de Sébastien Tellier ou version perfecto d’Antoine, les chemises à fleurs en moins, le rictus vicieux en plus? Lundi soir, au Vooruit de Gand, DJ Harvey est derrière les platines. Une petite légende underground pour clore les 10 Days Off, 18e édition. Des débuts punk puis des premières plaques disco-house tournées au début des années 80, avant de prendre la tangente. Depuis quelques mois, Harvey est de retour aux affaires. On l’a vu en juin au Libertine. Là au Vooruit, il met la pâtée disco aux fêtards. Les mecs à singlets, les filles oranges fluo, les casquettes de truckers américains, les sosies de Bernard Hinault, période La Vie Claire… Tout le monde se dandine gentiment sur les roulements discos du père Harvey.

Vu comme ça, on a du mal à se dire que les 10 Days Off pourraient en rester là. Pourtant, au moment de mettre un point final à son palmarès 2012, le festival électronique gantois a tenu à tirer le sonnette d’alarme. L’institution que sont les 10 Days Off pourrait en rester là, faute de subsides. Au moment où Harvey balance Donna Summer dans les baffles, que le soleil commence à se lever sur le quai-terrasse du Vooruit, on met la main sur Philip De Liser, l’increvable programmateur du festival et du club Petrol à Anvers. « Ces 3 dernières années, on pouvait compter sur des subsides structurels. De la part de la Communauté flamande, cela représentait quelque 345.000 euros par an sur un budget total d’1,5 million. Cet argent, on ne l’aura plus. Ce qui risque de rendre la situation invivable. » Même en ouvrant la programmation à des plus gros morceaux? « On a toujours refusé de suivre une course commerciale. Ce n’est pas une option. Cela ne marcherait pas. D’abord parce que le Vooruit n’a qu’une capacité limitée. On ne peut pas concurrencer des festivals mammouths comme le Tomorrowland. Ce n’est de toutes façons pas notre vocation. On n’est pas un événement strictement dance, on est un festival de musique électronique, où la dimension festive est évidente, mais où l’on essaye aussi de trouver un équilibre entre programmation pointue et noms plus établis. »

Il y a 3 ans déjà, la réduction des subsides, la baisse du sponsoring culturel, avaient poussé le festival à se recentrer sur la salle principale du Vooruit. Mais sans que cela n’entache la marque. Au contraire. A première vue, la cuvée 2012 des 10 Days Off devrait d’ailleurs afficher le même taux de fréquentation que l’an dernier. Quant à 2013… « On devra se passer des subsides structurels et essayer d’obtenir à la place des subsides de projets, à renouveler chaque année. Ce serait trop bête qu’un événement comme les 10 Days Off ne puisse pas y avoir accès. Cela me paraît même invraisemblable. C’est un festival qui a été pionner, né un an à peine après le Sonar de Barcelone. Ce ne serait pas logique qu’il disparaisse. Mais bon, en même temps, plus rien ne pourrait me surprendre… »

En attendant, sur le dance-floor, ce roublard de Harvey a embarqué tout son petit monde. Gueulante soul sur roulement disco, suivi de martèlements plus house, presque acid. Chase de Moroder (la BO de Midnight Express) comme gros classique, puis en toute fin de course le Crispy Bacon de Laurent Garnier. Il est alors 7h du mat’, et la piste est encore bien remplie. L’Américain Jacques Renault enchaîne sur une même grille house. Quand on file, deux heures plus tard, le soleil est éclatant, ses rayons se frayant un chemin quasi jusqu’au dance-floor. « C’est bientôt l’heure des ‘zombies' », nous glisse-t-on. Les plus coriaces devraient s’agiter jusqu’en début d’après-midi. Les 10 Days Off, même pas morts…

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content