Critique | Musique

Le nouvel album de N.E.R.D, léger mais pas gratuit

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Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

POP | Après sept ans d’absence, N.E.R.D réussit son retour avec un cinquième album malin. Éclectique certes, mais consistant.

Dès le départ, N.E.R.D. s’est présenté comme un projet un peu bancal. Envisagé comme la « récréation » des Neptunes, le duo de producteurs formé par Pharrell Williams et Chad Hugo, auxquels est venu se joindre Shay Haley, le projet a toujours semblé tenir du dérapage à moitié contrôlé. Une entité un peu floue, volontiers impulsive. Bien sûr, il y a eu la fusion rock/hip-hop/funk et les hits malins et novateurs (She Wants To Move, Everyone Nose, Lapdance…). Mais aussi pas mal de frustrations, d’essais à moitié transformés, et, in fine, de brassage d’air et de vide -résumé dans un quatrième album, justement intitulé… Nothing.

C’était en 2010. Depuis, le retour de N.E.R.D. semblait d’autant plus improbable (ou inutile) que sa principale figure de proue avait réussi à trouver les clés d’un succès planétaire en solo. Qu’est-ce qui allait bien pouvoir pousser Pharrell « Happy » Williams à relancer une nouvelle fois le projet? À une encablure de 2018, voici pourtant bien une nouvelle saillie du trio. Avec son titre éponyme, N(o One) E(ver) R(eally) D(ied) pourrait suggérer que le « groupe » s’est trouvé une identité et s’est recentré sur son noyau dur. Alignant une liste d’invités quatre étoiles (Frank Ocean, Future, M.I.A., André 3000…), il est pourtant son effort le plus collectif. Et comme l’époque est ce qu’elle est, également son album le plus « politique ».

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On peut moquer l’idée d’un album « engagé », a fortiori de la part d’un groupe comme N.E.R.D., porté par un Pharrell Williams qui, ces dernières années, a davantage visé l’unanimité pop et le charity business que la confrontation. À sa manière, et malgré ses contradictions, No One Ever Really Dies réussit pourtant l’exercice. « The truth will set you free/But first, it’ll piss you off », annonce Pharrell en ouverture, mais c’est pour mieux entamer Lemon, premier tube aussi couillon qu’imparable, emballé par une Rihanna plus chuintante que jamais. Donnant le ton général du disque, il est à mi-chemin entre l’instantanéité pop des tubes solo de Williams et les gimmicks malins des productions antérieures de N.E.R.D. Sur Deep Down Body Thurst, griffé par la basse de Thundercat, la voix de Pharrell est une merveille de cool suave et plaintif, jouant carte sur table –« Man, fuck what you say/We’re gonna climb your wall ». Plus loin, Don’t Don’t Do It revient explicitement sur les violences policières aux États-Unis, avec l’inévitable Kendrick Lamar en featuring (également présent sur Kites, avec M.I.A.). Ailleurs, N.E.R.D. réussit encore l’un ou l’autre banger (1000 avec Future), et parvient même à rendre presque cool un reggae avec Ed Sheeran (Lifting You). Bien sûr, No One Ever Really Dies n’est pas le disque qui poussera à monter aux barricades. Mais en glissant l’une ou l’autre allusion au milieu des charts pop, il contribue à sa manière à une conversation qu’il ne peut plus éviter. Pour présenter le morceau ESP, Williams expliquait: « Ce que l’on découvre aujourd’hui, c’est que la vérité n’est entendue que quand elle sonne cool. » D’une certaine manière, N.E.R.D. a fait sa part de boulot…

N.E.R.D. , « No One Ever Really Dies », distribué par Sony. ***(*)

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