Critique | Musique

Le disque de la semaine: Shirley Nanette – Never Coming Back

Shirley Nanette © DR
Julien Broquet
Julien Broquet Journaliste musique et télé

SOUL | 40 ans après sa sortie, le label new-yorkais Truth & Soul réédit un album jadis tiré à 500 exemplaires de l’inconnue Shirley Nanette. Brillant.

Le disque de la semaine: Shirley Nanette - Never Coming Back

Alors que le marché de la réédition tourne à plein pot, avec un intérêt souvent tout relatif pour ne pas dire des allures d’attrape-nigauds, entre vulgaire dépoussiérage et éclusage de chutes censées justifier ces plus ou moins lucratives réapparitions, certains labels se sont fait une spécialité de déterrer des albums et des artistes de l’oubli. Voire de les sortir d’un anonymat auquel ils sont toujours restés confinés. Ainsi résonne l’histoire de Never Coming Back, formidable collaboration entre Hank Swarn, guitariste d’Earl Grant, et l’aussi souriante qu’étonnante Shirley Nanette. Si Shirley, chanteuse de jazz originaire de Portland, Oregon, est selon sa biographie officielle censée entamer sa carrière en 1981, cette petite pépite de Never Coming Back dit tout le contraire. On est au début des seventies. Hank Swarn revient de cinq ans de tournée avec Grant qui décède en même temps que son cousin de 17 ans dans un accident de voiture à Lordsburg, au Nouveau-Mexique, le 10 juin 1970. Al Nanette approche Hank, lui propose d’entrer en studio et d’enregistrer un album avec Shirley. Le musicien a déjà des chansons sous le coude. Des titres qu’il a composés sur la route. Une ou deux prises suffisent. Le disque est mis en boîte en une semaine avec des musiciens locaux. Il n’aura cependant pas le retentissement qu’il mérite. Pressé à seulement 500 exemplaires, Never Coming Back sort en 1973 sur Satara, un minuscule label de Portland. Et reste, forcément, voué à un cruel désintérêt.

Diana Ross et télécrochet…

Nanette, qui a baigné dans la musique dès sa plus tendre enfance, que ce soit à l’église ou à la maison, et rêvait de devenir chanteuse d’opéra, a tour à tour, tout au long de son étrange carrière, chanté la pop, le R&B, le jazz et le gospel. Une affaire de famille? Un peu. Son grand-père maternel était le cousin de Bessie Smith…

Nanette a remporté en 1983 la première édition du télécrochet Star Search diffusé par la NBC et donné de la voix avec le Mel Brown Trio, à l’époque en ville pour accompagner Diana Ross. Elle a été reconnue comme la meilleure chanteuse de Portland, a flirté avec le théâtre et est même récemment entrée au Jazz Society of Oregon’s Hall of Fame. Jamais cependant, l’Afro-Américaine n’a rencontré le grand public. Trésor trop longtemps caché, Never Coming Back revit aujourd’hui grâce au label Truth & Soul, petit frère de l’indispensable écurie Daptone auquel un morceau comme People Are Thinking fait d’ailleurs sacrément penser. Après le single All Of Your Life en 2012, la maison de disques de Lee Fields réédite aujourd’hui un premier album qui résume plutôt bien les talents vocaux de cette femme pieuse de l’Oregon -soit dit en passant toujours bel et bien vivante et même active dans le milieu de la musique. De Give and Take à Never Coming Back, Nanette and co signent en dix titres aux ambiances variées un parfait petit condensé de soul vintage. A découvrir d’urgence.

  • DISTRIBUÉ PAR TRUTH AND SOUL/V2.

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