Critique | Musique

Larry Levan, disco genius

Larry Levan © DR
Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

Une nouvelle compilation rassemble une vingtaine de remix post-disco de Larry Levan, légende incontournable de l’histoire de la dance music.

Pour beaucoup, c’est le DJ ultime. Celui dont le nom symbolise le mieux cet art, toujours plus subtil qu’on ne le pense, qui consiste à raconter une histoire, construire une atmosphère, et installer un climax, voire allumer une épiphanie, simplement en enchaînant les bons disques au bon moment avec les bons effets. A la charnière 1970-1980, Larry Levan avait de l’or dans les mains: le « Jimi Hendrix des platines » comme on le surnomme souvent, pour sa dextérité autant que pour sa disparition précoce (affaibli par sa dépendance à l’héroïne, il est mort d’une crise cardiaque en 1992, âgé d’à peine 38 ans).

La légende est facile. Dans le milieu de la nuit, elle se crée même encore plus vite qu’ailleurs. Les témoignages de l’époque sont cependant nombreux, tous concordants, pour raconter à quel point Levan parvenait à amener son audience vers l’extase. Né Lawrence Philpot le 21 juillet 1954 à New York, Larry Levan a commencé à manipuler les platines au début des années 70, en même temps que son pote Frankie Knuckles (autre nom crucial de l’histoire de la dance music, directement associé à la naissance de la house). Epaulé par Nicky Siano (The Gallery), fan de l’éclectisme d’un Mancuso (The Loft), Levan est ainsi tombé dans la marmite disco dès les premières heures. Quand il se retrouvera aux commandes du Paradise Garage, en 1977, il en fera l’un de ses principaux temples, accompagnant sa mutation jusqu’à la house music.

Anarchy on the dancefloor

Contrairement aux extravagances glamour du Studio 54, le décor du Paradise Garage était assez brut de décoffrage. Son principal atout était en fait ailleurs: Levan passa en effet beaucoup de temps à mettre au point le meilleur sound-system possible, maniaque obsessionnel réglant l’orientation des enceintes au millimètre près. Pour autant, le feeling l’emportera toujours sur la technique. Quitte par exemple à enchaîner deux disques aux BPM différents. Une hérésie dont Levan se foutait joyeusement, en génie têtu et capricieux qu’il était, traçant sa propre route sur la piste de danse.

De ces DJ sets, il reste quelques traces (un fameux Larry Levan Live at the Paradise Garage, publié par Strut en 2000). Il est cependant plus facile encore de mettre la main sur la série de remix qu’a réalisée Levan. Prolongeant l’héritage des pionniers Tom Moulton ou Walter Gibbons, Levan produira en effet des dizaines de maxis, remix, 12 inch… C’est cette facette-là qu’illustre la nouvelle compilation Genius of Time.

Elle reprend quelque 22 titres retravaillés (Grace Jones, Loose Joint, Gwen Guthrie…), redécoupés, rallongés par Levan. Si les plus emblématiques ne sont pas tous présents, loin de là, la liste proposée résume bien les obsessions de Levan. Notamment cette capacité à disséquer un titre, pour mieux remettre ses différents éléments en évidence, et ainsi recréer une nouvelle danse/transe. Certes, plus de 30 ans après, certains morceaux sonnent forcément datés, ancrés dans leur époque. Leur pulsation, cependant, opère toujours, témoignant de l’une des pages les plus essentielles de la dance music.

DISTRIBUÉ PAR UNIVERSAL.

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