L’incroyable virée thaï de Spagguetta Orghasmmond: « Je ne sais pas si on les a offusqués mais certains se mettaient la main devant la bouche »
Globe-trotteurs et trublions de la scène musicale wallonne, les zozos de Spagguetta Orghasmmond reviennent sur leur dépaysante et mouvementée tournée thaïlandaise.
Les voyages forment la jeunesse. Mais qu’en est-il une fois l’éducation terminée? On ne récupérera probablement plus jamais les Spagguetta Orghasmmond… Le groupe carolo-tournaisien qui chante l’amour dans le Pays Noir et les champions cyclistes italiens continue cependant de se promener aux quatre coins du globe. Journal de son périple thaï.
DIY, El Chapo et Matthieu Ha
Barako Bahamas: « Les concerts pour 300 balles en Belgique, j’en ai un peu marre. Avec Spagguetta, l’idée, c’est de sortir des 45 tours et tous les ans de se faire un gros voyage. En 2015, on s’était envolés pour le Texas et l’année dernière, on avait atterri au Mexique. Lors d’une tournée en Europe, le groupe Los Sustos s’était fait piquer tout son fric et avait squatté pendant une semaine au Rockerill. En contrepartie, ils nous avaient aidés à trouver des concerts chez eux. On a enregistré ensemble et on va sortir un quatre-titres. Notamment un morceau sur le narcotrafiquant El Chapo. Il y a toujours un projet artistique derrière. Un disque, un clip, des photos… Cette fois, nous voulions partir en Asie. Matthieu Ha, un accordéoniste bruxello-tournaisien d’origine vietnamienne qui avait roulé pas mal sa bosse dans la région nous a filé quelques plans. On a monté une compilation pour l’occasion intitulée Tour de Thaï. »
T. Raznor: « L’idée à la base était de faire la Thaïlande, le Laos et le Cambodge. Mais nous n’avions aucune notion des distances. Sur l’affiche conçue pour annoncer la tournée, Élodie Moreau nous a représentés en sculptures stylées thaï. Pour la mise en scène, on s’est servi de djellaba, de fleurs en plastoc… Un type là-bas nous a envoyé: « I can not use it. – Why? – For your safety… » On a compris en le rencontrant. Comme disait Zappa, l’esprit, c’est comme un parachute, ça ne fonctionne que quand c’est ouvert. »
Nights in Bangkok
Barako Bahamas: « Après avoir retrouvé nos bagages et nos instruments coincés à Moscou, on a donné notre premier concert au Overstay. Un club punk et un public de connaisseurs qui s’est abandonné aux joies de la farandole. Un peu trop bourrés, on a dormi sur place. Le retour en taxi nous a coûté trois fois moins cher que l’aller. On a enchaîné avec le JAM Café où on a partagé l’affiche avec Gaff E, une performeuse américano-berlinoise super chouette entre synth punk et bidouillage variétoche qui a une chanson sur les camionneurs. Au moment de réclamer notre cachet, le patron nous a dit: « Déduction faite des boissons, vous nous devez 400 bahts (environ 11 euros) … » À notre troisième concert, il y avait beaucoup de Chinois. On y a joué notre morceau Opium en sino-spagguettanien. Je ne sais pas si on les a offusqués mais certains sont partis et des filles mettaient leur main devant la bouche. Faut dire qu’on y parle de Mao, de Deng Xiaoping et de nid d’hirondelles. Vu ce qu’on avait bu et offert, on a dû rentrer à pied avec tout le matos… »
Steph’O’Maltine: « Le soleil, la chaleur, le monde, le bruit… Bangkok, c’est le jour et la nuit avec ici. En termes de pilosité aussi. Il est arrivé plusieurs fois que des filles viennent me toucher la barbe. Des mecs également. Après, tu sais jamais vraiment… Je pense que les gens ont été surpris par Spagguetta. Ils n’ont pas spécialement l’habitude d’être bousculés. En même temps, on n’a pas vraiment rencontré de groupes thaïs. Et dans le public, il y avait pas mal d’expats. Mais partout où on est passés, ça a fini par marcher. On est assez universels. »
Boeuf, Omar Souleymane thaï et hippies…
Barako Bahamas: « Lors de notre deuxième concert à Chiang Mai, le public voulait un rappel. Alors qu’on sirotait des mojitos, un Amerloque a sorti sa trompette et s’est mis à faire du Miles Davis. Russell, l’organisateur, s’est installé aux congas et on est remontés sur scène pour une heure d’improvisation. Une Mexicaine s’est même lancée dans un slam en espagnol. Sur un marché de nuit, on a rencontré un photographe de cérémonies d’une soixantaine d’années. Il mettait un tas de costumes traditionnels à disposition. On s’est dit que ça ferait une super pochette et on a passé la matinée du lendemain ensemble. Chaiya Sirima, c’est son nom, nous a montré des photos de lui dans les années 70 et s’est mis à chanter des morceaux en thaï. Il a sans doute eu son petit succès à l’époque. On pourrait peut-être en faire le nouveau Omar Souleymane… Ça s’est moins bien passé dans le village hippie de Pai. Rien que pour y aller. Trois heures de route, 762 virages et un chauffeur qui se prend pour un pilote de Formule 1. Pas drôle. Le patron du Mojo Café a interrompu notre concert parce qu’on avait légèrement dépassé le nombre de décibels autorisés. Il était surtout pressé de jouer avec ses potes de vilaines covers de blues pour touristes américains. »
Accords bilatéraux et escale russe
Barako Bahamas: « De retour à Bangkok, on a joué pour fêter les 150 ans des accords bilatéraux entre la Thaïlande et la Belgique. On a débarqué sur scène déguisés en bouddhas. Il y avait des mecs de l’ambassade sur le dancefloor. C’était l’annif de Thomas (T. Raznor). On a réussi à ne pas rater l’avion du retour mais c’est peut-être parce qu’il avait quatre heures de retard et que comme Tom avait perdu son téléphone, on n’avait pas reçu le message de la compagnie pour nous prévenir. On a raté notre correspondance à Moscou par contre et on a choisi les vouchers en guise d’indemnités. On voulait boire des bières avec mais c’est interdit… On a donc passé la nuit aux sandwiches de saumon russe et au café tiède. L’occasion de bosser sur une nouvelle chanson… »
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