Critique | Musique

Girls – Father, Son, Holy Ghost

ROCK | Hype indie rock du moment, le duo Girls sort un 2è album solide, dans lequel la voix d’Owens préserve des accents de sincérité totalement désarmants.

Rien ne vaut une bonne histoire. Celle de Girls est, dans le genre, plutôt épique, foutrement rock’n’roll. Au centre du duo de San Francisco, il y a Christopher Owens. Né en 1979, il a été élevé au sein d’une secte, The Children of God, culte créé dans la foulée des communautés hippies des années 60. Refus de la technologie, abus sexuels… Le refrain est connu. A l’âge de 16 ans, Owens réussi à s’enfuir, et part rejoindre sa s£ur au Texas. Là, c’est la rue, la rébellion, le punk et les pilules. Jusqu’à la rencontre avec un millionnaire texan excentrique qui le prend sous son aile, et l’empêche de parachever son entreprise d’autodestruction.

Finalement, Owens rejoint San Francisco où il rencontre à la fois son compère Chet « Jr » White, et le grand amour. Avant de le perdre. C’est dans ce climat, chargés à la coke et à l’héroïne, qu’Owens et White enregistrent un premier LP, intitulé… Album. Sorti en 2009, la plaque était un petit bijou de pop déglinguée, à la fois solaire et crasseux, évident et dissonant à l’image du single-phare, le parfait Lust For Life.

Soleil noir

Album était évidemment nourri du parcours tumultueux d’Owens. Mais jamais au point d’être phagocyté, et de se voir transformé en simple bande-son d’un récit sulfureux. La question est reposée aujourd’hui que sort le 2e album du groupe: Father, Son, Holy Ghost est-il assez solide pour tenir tout seul?

Premier constat: le disque a déjà affolé blogs et critique américaine traditionnelle. Au point de faire de Girls le buzz indie rock du moment. Justifié? Il ne faut en tout cas que quelques écoutes pour être convaincu de l’intensité de ce Father, Son, Holy Ghost. Et encore quelques autres pour arriver à en faire le tour. Car par rapport à l’Album initial, Girls a continué à complexifier et densifier son approche, réservant à chaque morceau une nouvelle surprise. En vrai, le côté lo-fi n’est pas abandonné. Mais il se retrouve davantage dans l’esthétique que dans la production, riche et précise (mais toujours pas lisse).

L’attitude, elle, est restée identique: un mélange de dilettantisme slacker et de romantisme pop désespéré. C’est la voix d’Owens qui en trace le mieux les contours: elle s’adapte d’un titre à l’autre -gouailleuse un moment, livide l’instant suivant-, sans jamais paraître tricher. Derrière, c’est le grand 8. Les modèles de base n’ont pas changé: Girls voue toujours une admiration sans bornes à la pop californienne des Beach Boys, et vénère l’instantanéité d’un Buddy Holly. Cela se retrouve, par exemple, dans le titre d’ouverture: les 2 minutes 30 de Honey Bunny filent droit, tout en roulement surf et guitares twangy. Mais dès le morceau suivant, le ton change. La mélodie d’Alex fait ainsi penser au meilleur de Teenage Fan Club. Plus loin, la plainte déchirante de Vomit est justement soulignée par un orgue Hammond et un choeur gospel.

Rien de neuf certes sous le soleil noir. Girls raconte des histoires éternelles de chaos existentiel, de coeurs en lambeaux, mais avec des accents de vérité et surtout de foutues bonnes chansons. Rien ne vaut un bon disque…

Laurent Hoebrechts

GIRLS, FATHER, SON, HOLY GHOST, DISTRIBUÉ PAR TURNSTILE/PIAS. ****
EN CONCERT LE 15/11, AU TRIX, À ANVERS.

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