C’était une radio communautaire destinée aux Bruxellois, de toutes provenances. C’était la radio sur laquelle DJ Kwak a tenté de transmettre sa passion pendant plusieurs années. Une radio qui sortait de l’ordinaire musical de la bande FM avec un réel attachement à sa région et une réelle plus-value pour celle-ci. L’extinction du courant, c’est « le coup du manager ». In my hard drive, S4E25.
Le Top Manager. Cette plaie des temps modernes. Un être humain, assis derrière un bureau, ne connaissant de la vérité que celle des chiffres. Et encore. On leur fait dire ce qu’on veut, aux chiffres. C’est le fameux « 3700 manifestants selon la police, 56000 selon les organisateurs ». Avec l’aide de son consultant, généralement une jeune loup aux dents longues, frais émoulu d’une Business School quelconque, il conçoit une politique de rentabilité à tout prix. Confondant probablement denrée chiffrable comme du dentifrice, et denrée inchiffrable, comme l’impact d’un média sur son lieu d’émission. Dans toutes les radios, le « consultant » est gourou. Probablement sans jamais avoir fait la moindre heure d’antenne, voire sans même jamais avoir prêté l’oreille au média qu’il saccage.
Très peu de radios on vu les recettes du dit « consultant » couronnées de succès. Pourtant, FM Brussel a fourni des dizaines d’animateurs, techniciens, journalistes aux radios de la VRT. Il s’agit donc bien d’un outil de formation non-négligeable en plus d’être une radio de qualité. La seule radio néerlandophone, dans le paysage bruxellois, à sortir du plus petit commun dénominateur radiophonique, la seule à fournir une vision plutôt complète de la vie nocturne locale, l’une des rares à fournir une actualité propre à Bruxelles. La seule radio néerlandophone avec une « vraie » mentalité bruxello-bruxelloise, où l’on pose une question en néerlandais, question à laquelle l’on répondait, qui en français, qui en flamand, qui en anglais. Le consultant est venu, de manière éparse, pendant quatre mois voir le travail de cette station, le directeur exécutif a pris ses fonctions voici moins d’une année. J’en compte sept (ou huit?), de présence hebdomadaire, au compteur. Plusieurs de mes amis en comptent onze.
Si Michel Tubbax, un ancien de notre honorable maison Roularta, avait l’appétit numérique, cela se saurait, attendu que même ici, le contenu numérique spécifique (un podcast, par exemple) est réduit à sa portion congrue. L’excuse du « tout au numérique », utilisée pour justifier la fermeture de la radio me paraît donc, disons, au moins fallacieuse. Tout comme mentionner StuBru, Radio Donna ou Radio Een, comme une concurrence légitime. FM Brussel ayant un ancrage local que n’ont pas ces stations. Ou comme j’ai pu le lire sur Twitter, Nostalgie Vlaanderen, TopRadio ou d’autres. La communication autour de la suppression de cette radio est catastrophique, pour ne pas dire mensongère. Et je vois mal Monsieur Tubbax regagner la confiance de ses administrés. Lesquels avaient, par ailleurs, fortement encouragé la fusion des médias flamands pour plus de synergies entre eux. Le même Tubbax, qui, hier en interview, appelait la radio, « ce truc, euh, cette radio ». On sent le respect. Rien à dire!
Pour mon histoire personnelle en son sein, FM Brussel m’a accueilli sur ses ondes, sans même avoir lu mon projet d’émission; projet envoyé à une radio de service public de laquelle, par ailleurs, j’attends toujours une réponse, sept ou huit ans après l’avoir envoyé. Pour mon histoire personnelle, j’ai vu le ventre de ma femme grossir et bouger pendant nos émissions de la saison 2009-10, mon fiston a grandi dans ces studios, nous accompagnant chaque semaine à l’émission. J’ai demandé de passer de une heure à deux heures hebdomadaires, puis de faire du direct. Cette radio m’a appris une facette de mon métier, et je peux affirmer avec certitude, que si, je suis pro sur antenne, c’est grâce à l’école FM Brussel.
La mobilisation citoyenne, consécutive à l’annonce de l’arrêt des émissions de FM Brussel, compte plus d’acteurs que les voix de préférence des « éminences » Gatz et Smet, les responsables politiques de ce dossier. Vingt-quatre heures après la nouvelle. Ce qui me fait dire, certes, de façon un peu démagogique, que la légitimité démocratique de la radio qu’ils éteignent est supérieure à la leur. Sans parler de l’entourloupe politique sous-jacente dans cette triste histoire.
Je suis triste pour mes collègues et amis Koen, Koen Kim, Emilie, Chantal, Yasmina, Jeroen, Joachim, Filip, Melina, Bram, Lotte, Bart Yoeri, Stefanel, Youri, Khalid, Ramone, Sam, Bleri, Sofie, Tanguy, Walter, Karel, Karim, Sasha, Maarten, Saïd, Liesbeth, Lore, tous les bénévoles des émissions de soirées, les auditeurs, les collègues de BVM travaillant chez Agenda.be, Brussel Deze Week, Madame Anne Brumagne. Une somme de talents et d’expertise incroyable, de vrais pros, passionnés, mobilisés 24h/24, mais le talent, sais-tu, ça ne se monnaie pas, c’est quotité négligeable.
En vous souhaitant une excellente semaine. Quoi que vous fassiez, faites-le bien.
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