Critique | Musique

Discodeine – Discodeine

ELECTRO | En marge de la French Touch, le duo formé par Pilooski et Pentile sort un premier album disco-no wave long en bouche.

Il y a d’abord le titre du projet, qui hésite entre le club et la pharmacie. Ce n’est pas un manifeste mais presque: Discodeine vise bien la piste de danse et les déhanchements langoureux, mais, pour être clair, loin des clichés à pattes d’éph’. Musique de drogués alors? Il y a de ça.

Le remède est administré par un duo. A la barre, on retrouve Pilooski (des remix pour LCD Soundsystem, notamment) et Pentile. Un binôme français. Un de plus? Certes, mais les gaillards oeuvrent un peu à l’ombre de la French Touch classique à la Justice, Brodinski et consorts. Pour définir leur fenêtre de tir, ils parlent ainsi d’une musique mêlant « le face funky de Messiaen, les côtés les plus drôles de Can, et la face sombre de Gotainer. » Drôle, tongue-in-cheek, mais pas complètement faux non plus.

La posologie de Discodeine? A définir, mais on notera que l’antidote prend son temps pour agir. Un disque long en bouche, qui se déplie sur la durée et choisit une narration filmique, B.O. d’une nuit, pas forcément glauque, mais vaguement poétique (les 10 minutes de Figures In A Soundscape).

Casting

En fait, Discodeine a d’abord fait sensation avec un 1er titre, balancé l’automne dernier. Dans son genre (nu-disco, pour faire court), Synchronize est imparable, track au pouvoir dansant irrésistible. Cerise sur le gâteau, c’est ce bon vieux Jarvis Cocker (Pulp) qui vient donner de la voix, parfaitement à l’aise dans un registre plutôt inédit pour lui. Le casting est d’ailleurs l’une des forces de Discodeine. Le disque s’ouvre par exemple avec Singular. Tout en claps, le morceau house mollasson voit débarquer Matias Aguayo, qui y va de ses habituels murmures suggestifs. Plus loin, c’est Baxter Dury (le fils d’Ian) qui vient crooner son spleen sur D-A, belle ballade cabossée.

En général, Discodeine évite d’être trop frontal. A cet égard, Synchronize reste le morceau le plus direct du disque, un cas presque isolé, avec Invert. Ring Mutilation file aussi relativement droit, mais en jouant davantage sur l’angoisse, retour de virée un peu inquiet. On est ici moins proche de la disco new-yorkaise que du kraut-rock made in Germany (Homo-compatible). Quoiqu’il arrive, Discodeine reste toujours arrimé d’une façon ou d’une autre aux années 80. Avec ses steelpans caribéens, Falkenberg a l’air ainsi tout droit sorti des studios Compass, session inédite du label no wave Ze Records (Kid Creole, Cristina, Lizzy Mercier Descloux…).

Certes, Discodeine n’a pas choisi la voie de la facilité. Ambitieux dans la démarche, mais modeste dans l’attitude, le duo joue sur les nuances. Peu de climax, des montées lentes, des atmosphères sombres… L’ensemble pourrait paraître parfois aussi très (trop) contrôlé. Mais cela n’empêche jamais la potion de faire son effet. A sa manière, insidieuse…

Discodeine, Discodeine, distribué par Pschent/PIAS, ***

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Laurent Hoebrechts

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