Critique | Musique

Cults – Cults

ROCK | Duo californien installé à New York, les Cults plongent la pop sixties bubblegum dans l’acide, le temps d’un premier album aussi fulgurant qu’attachant.

La frontière est parfois mince entre le plaisir éphémère et la sucrerie pop durable. Avec ses 34 minutes (pour 11 titres), le premier album de Cults a le charme de l’instantanéité, celui du coup de foudre printanier qui se suffit à lui-même. Le genre de friandise acidulée qui, pour coller aux dents, ne peut s’empêcher de distiller un venin plus piquant. Explications.

Cults est un duo mixte: Madeline Follin (voix) et Brian Oblivion (voix, guitares, percussions) viennent de Californie, mais ont réellement mis en place le projet au moment où ils ont débarqué à New York, pour les études. La précision géographique n’est pas anodine. Il y a en effet une ambiguïté dans la musique de Cults, entre l’ambiance solaire de la Côte Ouest et l’âpreté urbaine de la Côte Est. Ce n’est pas le seul grand écart. En interview, les 2 expliquent avoir des goûts musicaux diamétralement opposés. Le folk et l’americana pour Follin; le rock stoner et l’electronica à la Squarepusher ou Aphex Twin pour Oblivion. Les 2 se sont donc retrouvés sur la seule passion commune: la pop sixties.

Jim Jones au générique

Ils pourraient difficilement le cacher. Dès le single Abducted, Cults affiche son goût pour les beats et le mur du son « spectoriens », celui des girls bands des années 60. Les tambourins et les claps sont là (Bad Things), les clochettes cristallines aussi. La voix-même de Follin répond parfaitement à l’esthétique recherchée, quand elle ne se fait pas carrément enfantine (les Jackson Five sur Go Outside?). Et quand elle entame You Know What I Mean, il est difficile de ne pas penser au Where Did Our Love Go des Supremes.

Evidemment, le duo a pensé à tordre un peu l’aspect sucré des chansons. Souvent, les guitares de Oblivion se font bruitistes, rêches et sépulcrales, tandis qu’un morceau comme Oh My God démarre comme une chute de studio de Screamadelica (le chef-d’oeuvre drogué de Primal Scream, sorti en 91). De son côté, Go Outside commence par l’extrait d’un discours de Jim Jones, gourou cintré qui ordonna le « suicide » de 900 de ses disciples en Guyane, le 18 novembre 1918… En général, le sirop des mélodies a du mal à cacher la noirceur de certaines paroles. Sur le morceau du même titre, « I can never heal myself enough for you », chante Follin, guillerette, avant de conclure, « so fuck you »

Evidemment, au bout de la grosse demi-heure, il est difficile d’imaginer un quelconque futur pour le duo. En attendant, et au moins jusqu’à l’été prochain, il n’est pas interdit de vénérer les nouveaux Cults.

Laurent Hoebrechts

Cults, Cults, distribu par Sony. ***
En concert le 19/08 au Pukkelpop.

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