Critique | Musique

Cody Chesnutt – Landing on a Hundred

© Sabrina Mariez
Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

SOUL | On n’y croyait plus vraiment. Dix ans après ses débuts, Cody Chesnutt sort enfin un deuxième album, disque de soul soyeuse et élégante

CODY CHESNUTT, LANDING ON A HUNDRED, DISTRIBUÉ PAR UNIVERSAL. ***

EN CONCERT LE 03/03, AU DEPOT, LOUVAIN.

C’est ce qui s’appelle chercher misère. Alors que d’aucuns sortent leur disque par an (la nymphette r’n’b Rihanna), voire plusieurs en quelques mois (le rockeur Ty Segall), Cody Chesnutt a préféré prendre son temps. Un euphémisme. Il a fallu dix ans pour donner une suite à son premier album…

En 2002, Chesnutt sortait alors The Headphone Masterpiece, album produit à l’arrache. Le disque est en effet enregistré sur un simple 4-pistes. Un petit bijou de soul bricolo qui déborde de partout, long de près d’une centaine de minutes, réparti sur deux CD. Chesnutt fait le forcing pour se faire connaître, file des exemplaires aux oreilles attentives… Le déclic a lieu quand le groupe rap The Roots ré-enregistre l’un de ses morceaux, The Seed, et en fait l’un de ses plus gros tubes (sur l’album Phrenology). Tout semble donc se mettre en place. En route pour la gloire, Chesnutt va pourtant se perdre en chemin. Ou plutôt, il va décider de faire demi-tour. On l’aperçoit dans le docu musical de Dave Chappelle, Block Party (2006). En 2010, il lâche également un EP d’une douzaine de minutes. Et c’est tout. Chesnutt s’est délibérément mis hors-circuit. Ses priorités ont changé: le bonhomme a décidé de se consacrer à sa famille et sa communauté, quittant l’agitation de Los Angeles pour Tallahassee, paisible ville universitaire de Floride.

Soul royale

Le voilà pourtant de retour au charbon. Comme quoi, il y a de ces virus qui, une fois inoculés, ne vous laissent jamais tout à fait tranquille. A nouveau, Chesnutt a dû batailler, mobilisant une récolte de fonds via Kickstarter pour achever la production de son disque. Histoire également de pouvoir contrôler toutes les étapes du processus. Pour le reste, Landing On A Hundred n’a que peu à voir avec le côté brut de The Headphone Masterpiece. Conjugant une grammaire r’n’b-soul sixties-seventies, Cody Chesnutt a pondu un disque luxuriant, riche de cuivres, de cordes, d’arrangements soyeux. L’album a d’ailleurs été enregistré dans les studios Royal, Memphis, endroit légendaire où Al Green, épaulé par Willie Michell, a notamment gravé des sommets de soul suave, comme Let’s Stay Together ou I’m Still In Love With You. Chez Cody Chesnutt, cela donne par exemple Love Is More Than A Wedding Day, qui lorgne également du côté de Marvin Gaye.

Davantage classique que rétro, l’option soul de Cody Chesnutt sert de cadre parfait pour ce qui sonne parfois comme un album de rédemption, un renouveau spirituel. Landing On A Hundred commence ainsi par ces mots: « I was a dead man, I was asleep, Till I met Thee. » La musique soul a toujours été tiraillée entre élan sacré et contingences plus matérielles. Cody Chesnutt ne fait pas exception à la règle. Par exemple quand il chante l’addiction –« I used to smoke crack back in the days », en entame d’Everybody’s Brother. Sur I’ve Been Life, il aligne également le nom des pays du continent africain, ajoutant au passage un grain afrobeat, élargissant son champ de vision. Sans rien révolutionner, Chesnutt revient ainsi avec un disque solide, classe et crédible. Comme quoi, cela valait le coup d’attendre…

L’affichage de ce contenu a été bloqué pour respecter vos choix en matière de cookies. Cliquez ici pour régler vos préférences en matière de cookies et afficher le contenu.
Vous pouvez modifier vos choix à tout moment en cliquant sur « Paramètres des cookies » en bas du site.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content