Club Plasma, les 10 ans: « Après tout, Blur est bien passé aux Casemates de Mons… »

Le Reflektor © Club Plasma
Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

Rassemblant une dizaine de salles rock de la Fédération Wallonie-Bruxelles, le réseau Club Plasma fête cette année ses dix ans. L’occasion de valoriser des lieux, des artistes, et surtout l’expérience du concert…

L’intérêt des anniversaires tient au moins à ça: mesurer le chemin parcouru. Il y dix ans, le réseau Club Plasma se mettait tout doucement en place. Pour la première fois, quelques-unes des principales salles rock du sud du pays rassemblaient leurs énergies au sein d’une même structure. Il a fallu le temps: Club Circuit, son équivalent flamand, existait alors depuis une décennie…

C’est que le rock n’a jamais été une affaire simple en Communauté française (ex-Fédération Wallonie-Bruxelles), toujours un peu à la traîne. Dans les années 90, la Flandre se découvrait une pépinière de groupes à haut potentiel, y compris international (dEUS, Soulwax, Hooverphonic…). Au même moment, le rock wallon galérait toujours. Il lui faudra une dizaine d’années pour se mettre en ordre de marche. Avec d’abord la création de Court-Circuit, en juin 1992. « Le but était de soutenir, promouvoir et informer le secteur rock en Communauté française », explique le coordinateur actuel de l’asbl, David Dehard. A l’époque, Internet n’existe pas. Les groupes envoient encore leurs démos par la poste, et doivent passer un coup de fil pour recevoir un stencil de la quinzaine d’organisateurs de concerts opérant en Wallonie…

Le Magasin 4
Le Magasin 4© Club Plasma

Cinq ans plus tard a lieu la première édition du Concours Circuit, sorte de version francophone du Humo Rock Rally, compétition qui a joué le rôle de tremplin pour de nombreux groupes flamands. « La réflexion de départ était très simple. On assistait à cette explosion de talents en Flandre. Pourquoi cela ne se passait-il pas également chez nous? L’une des raisons était par exemple que les groupes n’avaient pas énormément de possibilités de tourner. Un groupe comme Mosaic Eyes, par exemple, s’est retrouvé à jouer à l’AB en première partie de My Bloody Valentine pour son tout premier concert… » Le manque de salles n’est alors pas seulement en cause. Les régionalismes ont aussi pu avoir un impact. « On parle d’une période où voir un groupe liégeois jouer à Bruxelles tenait presque de l’événement. » En mêlant les organisateurs de concerts à la mise sur pied d’un concours, Court-Circuit bousculait une première fois les vieux réflexes.

Petit à petit, les choses se mettront ainsi en place. En 2004, l’Ancienne Belgique fait le plein avec une soirée baptisée Sacrés Belges, réunissant une triple affiche entièrement francophone: Sharko, Ghinzu et Girls In Hawaii. Le moment est propice. Deux ans plus tard, le réseau Club Plasma est lancé, avec objectif notamment de mutualiser les enthousiasmes, de pouvoir présenter au moins une bonne salle dans chaque province et surtout de professionnaliser les équipements. « Si une salle n’est pas bien sonorisée, le public ne va jamais revenir. »

En toute intimité

Depuis 2004, certains lieux sont restés, d’autres ont disparu. Aujourd’hui, le réseau compte dix salles: Recyclart (Bruxelles), Magasin 4 (Bruxelles), l’Atelier 210 (Bruxelles), la Ferme du Biéreau (Louvain-la-Neuve), l’Atelier Rock (Huy), le Rockerill (Charleroi), Reflektor (Liège), le Salon (Silly), l’Entrepôt (Arlon) et le Belvédère (Namur). « Mais il n’y a pas deux structures similaires au sein de la plateforme. » De fait, il n’y a pas forcément grand-chose à voir entre la progra internationale du Reflektor, les affiches punk-DIY du Magasin 4 et les concerts à la bonne franquette du Salon. « Par contre, on demande à chaque membre de s’investir dans d’autres aspects. On n’acceptera pas la candidature d’un lieu qui veut se contenter d’organiser des concerts, dix fois par an. Il doit mettre en place d’autres activités de soutien. Certains proposent par exemple des résidences d’artistes. L’Atelier Rock prévoit des cours de musique, le Rockerill a un label… »

La Ferme du Biéreau
La Ferme du Biéreau© Club Plasma

Dix ans après sa création, le Club Plasma n’a pas permis de réduire complètement l’écart avec la Flandre. Une étude du réseau européen Live DMA, publiée en 2014, ne pouvait que le constater: en 2013, le nombre de concerts et d’artistes programmés par le Clubcircuit était de deux à trois fois plus important que dans le Club Plasma. Certes, les dépenses étaient de cinq à six fois plus élevées en Flandre. Mais les clubs flamands sondés ont également bénéficié de quatre fois plus de subventions que leurs homologues francophones…

Pour les dix ans de la plateforme, Club Plasma a toutefois reçu une enveloppe supplémentaire de 150.000 euros. « Un budget qui ne servira pas à financer directement les lieux, mais à nouer de nouveaux partenariats extra-muros. » Avec donc des endroits qui ne font pas (encore) partie du réseau, comme le Vecteur à Charleroi ou le Brass à Forest. Curieux? « Cela donne la possibilité de travailler sur le plus long terme et d’améliorer la visibilité du réseau. » En passant par d’autres endroits? « Disons que cela permet de toucher un autre public. L’idée, c’est d’être à nouveau séduisant, de valoriser l’expérience du concert, autrement qu’en festival. Donner le goût, en définitive. » Dans le contexte que l’on connaît, où les salles ont pu souffrir des événements, cela ne sera pas du luxe. « Puis, c’est aussi l’occasion de voir les groupes dans un cadre intimiste, avant qu’ils accèdent à des salles plus grosses. Des Belges, comme des internationaux d’ailleurs. Après tout, Blur est bien passé aux Casemates de Mons… »

Le Rockerill
Le Rockerill© Club Plasma
Concours Circuit en vue

C’est ce samedi 30 avril que débutera le programme-anniversaire des dix ans du Club Plasma: prévu au PointCulture, à Bruxelles, Music In Progress proposera des ateliers-rencontres destinés à ceux qui veulent faire avancer leur projet musical. Le gros morceau de l’année reste cependant l’organisation du Concours Circuit. L’objectif est toujours d’offrir une rampe de lancement à des groupes émergents (précédemment, des noms comme Sharko, Hollywood Porn Stars ou The K en ont notamment bénéficié). L’appelation pop-rock a de nouveau été abandonnée pour privilégier l’éclectisme: du rock garage au ska, du shoegaze au hip hop… Les inscriptions seront ouvertes à partir de la mi-mai, jusqu’en juillet. Par la suite, un jury sélectionnera, parmi les démos envoyées, le nom des groupes qui passeront par les éliminatoires. Suivront les tiers de finale et puis la finale, prévue au Botanique le 10 décembre prochain.

INFOS: WWW.COURT-CIRCUIT.BE

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