Zébu Boy

Ambila alias Zébu Boy rentre pieds nus au bercail. En 1940, comme 3 000 Malgaches, il s’était retrouvé dans les Ardennes, mitrailleur d’infanterie coloniale sur la ligne Maginot, face à la VIe Panzerdivision. Il avait perdu la plupart de ses amis dans les fondrières de la Meuse, entre Monthermé et Charleville-Mézières. Un mois après la proclamation de l’armistice, dans une France occupée qui, officiellement, n’était plus en guerre, Ambila dépérissait dans un autre Frontstalag, où les anciens camarades de combat étaient devenus leurs geôliers. À quoi lui sert cette citoyenneté promise « aux combattants de la Très Grande France »? Fauché, déshonoré, Ambila fait le compte des revers essuyés depuis sa démobilisation. Six mois écoulés depuis son retour et l’affaire ne passe pas… Madagascar, 1947, l’insurrection gronde. Le peuple saigné reprendra la terre sacrée des ancêtres, que les Français essorent depuis un demi-siècle.

Aurélie Champagne a 20 ans quand elle part à Madagascar en quête de ses origines. Elle découvre un pays qu’elle racontera à travers une nouvelle qui grandira année après année jusqu’à devenir ce premier roman. Souffle court, elle relate l’apparition des signes, les combats. Pour survivre au deuil, pour survivre tout court, Ambila confectionne des fétiches pour que les balles se fondent en pluie. En temps de guerre, il faut tenir sa langue; Aurélie Champagne la délie. Sous une braise poussiéreuse où les durées se télescopent, entre flashs animistes à la Terrence Malick au milieu de la brousse en feu, un texte habité, dévoré de soif et de colère.

D’Aurélie Champagne, ÉDITIONS Monsieur Toussaint Louverture, 256 pages.

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