Michel Verlinden
Michel Verlinden Journaliste

adulé, le Japonais passera à la postérité pour avoir imaginé les lignes de Final Fantasy. Rencontre au moment où 2 expositions bruxelloises consacrent son travail.

Voix de basse et débit lent, Yoshitaka Amano a pour habitude de ne pas regarder son interlocuteur dans les yeux quand il lui parle. Yeux mi-clos, on dirait que c’est au plus profond de lui-même que l’homme va chercher les mots. Sans doute est-il coutumier de l’introspection, lui qui a l’imaginaire pour demeure principale. D’un voyage en train -comme celui qui l’a mené à Bruxelles-, de feuilles agitées par le vent ou de la cheville furtive d’une femme, Amano garde trace dans les tréfonds de son être. Là, dans le mystère des profondeurs, couleurs et formes composent un étrange magma.  » C’est dans cet inconscient que je vais chercher la matière première de mon travail. Dans cet endroit où il n’y a ni gauche, ni droite, ni haut, ni bas.Le rêve occupe une place importante dans mon travail. » Il n’en faut pas plus pour l’imaginer en artiste bohème dormant le jour et dessinant la nuit. Faux. Amano travaille avec une rigueur toute stakhanoviste. A 58 ans, il bosse 7 jours sur 7, de 12 h à 21 h.  » Mon temps de travail est encadré par un rituel précis, le modifier reviendrait à déclencher des rouages impossibles à maîtriser. » On comprend qu’il serait délicat de toucher à cette belle mécanique, surtout lorsqu’on constate à quel point son carnet de commande est chargé. Vitraux, bijoux, décors ou costumes de théâtre, films d’animation, jeux vidéo, illustrations pour des livres de science-fiction… Le talent d’Amano s’exerce en tous sens.  » Pour moi, ces différents champs d’application sont autant d’opportunités d’apprendre à jouer avec les ficelles de ma créativité. Tout se rejoint.  »

Art Nouveau

S’il est de passage à Bruxelles, c’est que la Galerie Petits Papiers organise une expo-vente d’une série de portraits qu’il a réalisés, une partie de ceux-ci se réfèrent aux personnages héroïques qu’il a créés dans le passé pour des films d’animation – Gatchaman, Yatterman…- ou des bandes dessinées – Elric, Sandman, Vampire Hunter D, Elektra.  » Pour réaliser ces portraits, je me suis basé sur des souvenirs. C’est comme si j’avais pris en photo toutes les créatures qui sont sorties de mon cerveau. » Dans la foulée, la Maison Autrique s’intéresse à l’aspect Art Total -une notion chère à Victor Horta- du travail du Japonais. Une sélection de dessins de costumes, d’objets en céramique et d’univers conçus pour le cinéma ou le jeu vidéo, témoigne de ses influences.  » Celles-ci passent tant par l’Art Nouveau -qui lui-même a beaucoup emprunté au Japon- que par la bande dessinée américaine » , commente François Schuiten au dos du catalogue.

Avec le même calme olympien, Amano annonce un tournant dans sa carrière. Désormais, il travaille pour lui. « Final Fantasy m’a apporté la notoriété, maintenant je rêve de liberté. » Son projet? Une £uvre basée sur la mythologie asiatique. Une création-fleuve dans laquelle coexistent passé, présent et futur.  » Quelque chose de très difficile à comprendre pour un esprit occidental. »

Rêves et Portraits, Galerie Petits Papiers, 1, place Fontainas, à 1000 Bruxelles. www.petitspapiers.be Jusqu’au 23/10.

Maison Autrique, 266, chaussée de Haecht, à 1030 Bruxelles. www.autrique.be Jusqu’au 31/01.

Michel Verlinden

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