DECONSTRUCTING WOODY – DEUX COFFRETS RÉUNISSENT L’ESSENTIEL DES FILMS TOURNÉS PAR WOODY ALLEN PENDANT LES ANNÉES 90. ET Y AJOUTENT UN DOCUMENTAIRE SUR LE MUSICIEN. SAVOUREUX.

VOL 1: CELEBRITY, MIGHTY APHRODITE, DECONSTRUCTING HARRY, EVERYONE SAYS I LOVE YOU.

VOL 2: BULLETS OVER BROADWAY, SMALL TIME CROOKS, SWEET AND LOWDOWN, WILD MAN BLUES. DIST: TWIN PICS.

Si l’on désespère de le voir encore tourner un Zelig ou autre Manhattan, chaque nouveau film de Woody Allen n’en demeure pas moins un événement. Midnight in Paris, son dernier opus, aura ainsi les honneurs de l’ouverture du prochain festival de Cannes, et pas seulement parce que la première dame de France y fait ses débuts de comédienne. Tenu, pour sa part, de patienter jusqu’au 15 juin avant de découvrir la balade parisienne de Woody, le public belge pourra avantageusement meubler son attente avec 2 coffrets DVD qui réunissent l’essentiel des films tournés par le réalisateur new-yorkais pendant les années 90 -soit, à compter de 1994, quelque 7 longs métrages, relevés du Wild Man Blues de Barbara Kopple, documentaire de 1997 consacré à Allen musicien.

Maîtresse exigeante

Prolifiques, les nineties de Woody se révèlent aussi quelque peu inégales -l’inspiration est, on le sait, une maîtresse exigeante, dont les caprices constituent l’un des motifs récurrents de son cinéma, postulat vérifié d’éclatante façon à la faveur de Bullets over Broadway. Dans le New York des années 20, un dramaturge s’y voit contraint par le gangster qui finance sa pièce d’engager sa petite amie. Non contente de jouer comme une chaussette, cette dernière est flanquée d’un tueur chargé de la surveiller, lequel se révèle autrement inspiré que l’aspirant Eugene O’Neill. Remarquablement écrit, le film, par ailleurs fort drôle, est aussi formidablement interprété -Chazz Palminteri y est tout bonnement irrésistible. C’est un Allen grand cru, comme d’ailleurs Decon-structing Harry, un film dont la mise en scène reproduit la confusion de son personnage central, un auteur en panne d’inspiration et dont la vie intime n’est qu’un chaos indescriptible, dont le réalisateur tire moult ressources scénaristiques et formelles -imparable. Everyone Says I Love You l’est à peine moins, qui décline le désarroi amoureux de ses protagonistes sur le mode de la comédie musicale -et voit un Woody inspiré recourir à des moyens peu orthodoxes pour tenter de séduire Julia Roberts sur les canaux vénitiens, l’un des morceaux d’anthologie d’un film délicieux.

Moins heureux quand il décline les névroses de ses personnages sur fond de tragédie grecque ( Mighty Aphrodite), ou lors de ses retrouvailles avec le noir et blanc ( Celebrity), Woody boucle la décade sur 2 films dont l’apparente modestie n’enlève rien à la saveur, Small Time Crooks et Sweet and Lowdown. Prolongement judicieux à ce dernier (un régal de faux documentaire sur un guitariste aussi génial que fantasque, doublé d’une vibrante déclaration d’amour au jazz), Wild Man Blues nous convie à la rencontre de Woody Allen musicien, le temps d’une tournée qui l’emmène, avec son ensemble New Orleans, dans différentes villes européennes. Aux nombreux extraits musicaux joliment enlevés -Woody est un clarinettiste « sérieux », comme l’observe l’un de ses partenaires- s’ajoutent des instants glanés dans des circonstances diverses d’où émerge une personnalité contrastée. Ou encore Woody dans tous ses états…

JEAN-FRANÇOIS PLUIJGERS

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