Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

LANCÉ SUR LA SCÈNE PUNK DIY DE FLORIDE, MERCHANDISE S’EST MUÉ EN UNE FORMATION INDIE POP « À L’EUROPÉENNE ». AVEC DE SOLIDES CHANSONS ET PAS MAL DE PANACHE.

« After The End »

Merchandise

DISTRIBUÉ PAR 4AD.

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C’est forcément vrai, on l’a lu sur Wikipedia: Tampa, Floride, serait l’une des villes les plus agréables à vivre pour les plus de 20 ans. « Ah oui?, s’étonne Carson Cox, croisé avec son groupe en juin dernier. Nous, on se souvient plutôt d’une enquête qui la classait parmi les villes les plus déprimantes des Etats-Unis (rires). » La vérité? « Disons que ce n’est pas un endroit très sociable -ce qui nous va très bien, on peut facilement se cacher. Il y a juste le Gasparilla, une espèce de parade de carnaval, où tous les bourgeois de la cité se déguisent en pirates et se saoulent dans la rue (sourires). A part ça, la principale qualité de Tampa est l’isolement. Il ne se passe pas grand-chose et du coup vous pouvez créer facilement votre propre monde. On vit par exemple tous dans la même maison qui fonctionne un peu comme une forteresse culturelle. »

L’autarcie semble être en effet le principal mode de fonctionnement de Merchandise. Au départ formation punk hardcore, le groupe organisait lui-même ses concerts dans des entrepôts désaffectés, avant de mu(t)er progressivement. Sur son 2e album, Children of Desire (2012), l’un des morceaux ordonnait: Become what you are. Avec After The End, publié par le label anglais 4AD, Merchandise assume ses références indie pop eighties. « Sur le fond, cela ne change pas grand-chose. Je sais que je suis toujours en colère. On essaie de faire des disques qui ne font pas partie du système. »

L’influence des Smiths sonne comme une évidence -du ton grave de la voix de Cox à ses penchants pour le sarcasme romantique. Ce n’est pas la seule: de Talk Talk à Echo & the Bunnymen en passant par The The… (voire Prince sur Green Lady). Dans le clip de Enemy, David Vassalotti, autre pivot du groupe, tient sa guitare comme dans une vidéo de 1986. Ce dernier cite également le label… bruxellois eighties les Disques du Crépuscule –« il y avait un culot, une originalité à rassembler autant d’idées et de musiques différentes. Cela a énormément influencé la scène indie américaine, pas seulement nous. »

Il serait assez facile de voir dans Merchandise un énième revival eighties opportuniste. Tout en labourant ces terres-là, After The End reste pourtant le disque d’un groupe autiste, replié sur lui-même et ses fantasmes. Un ovni musical dans le paysage actuel, y compris (voire surtout) chez eux. « Il y a plein de manière d’écrire de bonnes chansons, insiste Cox. Zappa mélangeait bien Varèse et le doo wop… Puis, je suis né en 86. Tout est si facilement accessible de nos jours! Relier les choses peut être un moyen tellement puissant d’exprimer une idée -un esprit littéraire comme Joseph Campbell réussissait par exemple à mixer plein d’influences spirituelles. » On apprend par ailleurs que pour la première fois, le groupe fonctionne avec un manager. Pour autant, il ne semble toujours pas question de plan ou de stratégie, mais bien d’obsessions. « La thématique du disque est le vert. Un vert profond… Mais aussi le vert absinthe et le vert chartreuse. C’est peut-être lié à ma fascination du moment pour l’Art Nouveau… » Fumisterie ou esthétisme rafraîchissant? A écouter la musique de Merchandise, on penche volontiers pour la seconde option.

EN CONCERT LE 17/11, AU TRIX, ANVERS.

LAURENT HOEBRECHTS

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