LE CLASSIQUE DE RICHARD FLEISCHER BÉNÉFICIE D’UNE EXEMPLAIRE RÉÉDITION EN BLU-RAY VENUE SOULIGNER LES IMMENSES QUALITÉS D’UN THRILLER AUSSI FLIPPANT QUE NOVATEUR.

THE BOSTON STRANGLER

DE RICHARD FLEISCHER. AVEC TONY CURTIS, HENRY FONDA, GEORGE KENNEDY. 1 H 56. 1968. ED: CARLOTTA. DIST: TWIN PICS.

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LES INCONNUS DANS LA VILLE

DE RICHARD FLEISCHER. AVEC VICTOR MATURE, LEE MARVIN, RICHARD EGAN. 1 H 30. 1955. ED: CARLOTTA. DIST: TWIN PICS.

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Cinéaste par trop mésestimé, Richard Fleischer a laissé, tout au long de ses 40 ans de carrière, de nombreuses pépites, dans un registre allant du film noir (Armed Car Robbery, The Narrow Margin) au film d’aventures (The Vikings, 20 000 Leagues Under the Sea), et jusqu’à la science-fiction (Fantastic Voyage, Soylent Green). Sorti en 1968, The Boston Strangler, qui paraît aujourd’hui dans une édition Blu-ray exemplaire, est sans doute sa plus grande réussite, qui revenait sur les agissements de Albert DeSalvo, serial killer dont les meurtres de femmes allaient mettre la ville de Boston en émoi au début des années 60.

Son histoire, Fleischer l’appréhende en mode quasi documentaire, suivant les tâtonnements de l’enquête qui tente de remonter jusqu’au tueur une fois son premier forfait accompli, avant que ce dernier n’occupe bientôt l’avant-plan. Fluide autant que solide, la mise en scène s’appuie aussi sur diverses audaces techniques, en particulier un recours brillant au split-screen, traduisant admirablement la schizophrénie de l’assassin, en plus de renforcer, dès le magistral générique d’ouverture, la tension émanant du film. Laquelle ne se relâchera plus par la suite, faisant de ce thriller un modèle d’effroi et d’intelligence, culminant dans un final impressionnant, en appelant aux insertions subliminales. On peut, pour ainsi dire, parler de cas d’école, tant le réalisateur fait preuve d’une sobre maîtrise pour signer un classique époustouflant de bout en bout, transcendé encore par un Tony Curtis méconnaissable dans ce qui reste peut-être son plus grand rôle. Dans un complément passionnant, William Friedkin reconnaît sa dette à l’égard de Fleischer, un autre bonus revenant sur le tournage du film sur foi de témoignages de première main -celui du fils du réalisateur notamment, dont l’on apprend, et ce n’est certes pas fortuit, qu’il se destinait à l’origine à la psychiatrie. Essentiel.

Fuller chez Minnelli

Carlotta profite de l’occasion pour sortir un film rare du même Richard Fleischer, Les inconnus dans la ville (Violent Saturday). Les préparatifs du casse que s’apprêtent à commettre trois gangsters à Bradenville offrent au réalisateur l’opportunité de croquer la chronique d’une petite ville américaine, avec ses non-dits et ses secrets bien gardés. Au croisement du mélodrame et du polar claustrophobique -en bonus, Nicolas Saada parle d’une « intrusion de Fuller chez Minnelli »-, le film trouve une dynamique singulière, que souligne sa mise en scène organique. Et si Fleischer y expose le surgissement de la violence et de la brutalité de main de maître, Violent Saturday rappelle aussi, parmi d’autres qualités, l’excellent directeur d’acteurs qu’il était -Mature a, pour le coup, une consistance insoupçonnée, tandis qu’une scène suffit à dresser le profil sadique au-delà de tout entendement d’un Lee Marvin. Un pur régal, bénéficiant lui aussi de l’analyse éclairée de William Friedkin, qui achève de faire de ce Blu-ray un incontournable de plus.

JEAN-FRANÇOIS PLUIJGERS

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