Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

OMBRES ET LUMIÈRES. ENREGISTRÉ EN SEPTEMBRE DERNIER, BESTIVAL LIVE VOIT THE CURE ALIGNER SES MUES SUCCESSIVES, ENTRE CLASSIQUES NEW WAVE ET BRILLANCE POP.

« BESTIVAL LIVE 2011 »

DISTRIBUÉ PAR SUNDAY BEST/PIAS.

Avec un premier album sorti en 1979 ( Three Imaginary Boys), cela fait donc plus de 30 ans que Robert Smith promène sa tignasse new wave dans l’imaginaire rock. Pas toujours avec la même inspiration, certes. Mais avec assez de discernement pour ne jamais déraper complètement: le pathos oui, le pathétique non. Avec un rythme d’un album tous les 4 ans, le groupe anglais devrait logiquement sortir un nouveau disque cette année. En attendant, en 2011, The Cure a exploré son passé -avec un tel catalogue, il aurait tort d’être le seul à s’en priver. Et de proposer une série de concerts (Sydney, Londres, Los Angeles, New York) qui revisitaient ses 3 premiers albums joués en intégralité.

Mais The Cure a également inscrit son nom à l’affiche du Bestival, festival organisé à la base par le label anglais Sunday Best sur l’île de Wight. C’était en septembre dernier, devant 50 000 personnes, aux côtés d’autres gros morceaux, comme Björk, PJ Harvey, Primal Scream… Le live bénéficie aujourd’hui d’une sortie CD. Il ne faut pas se fier à la pochette: aussi hideuse soit-elle, elle ne cache pas un bootleg pourri, enregistré à la sauvette. Bestival Live 2011 est un album tout ce qu’il y a de plus officiel, doublé d’un geste caritatif (tous les bénéfices seront reversés à The Isle of Wight Youth Trust).

Chenilles et corbeaux

Si l’on compte bien, The Cure ajoute ici un 4e épisode à sa discographie live, le 1er depuis le double Show/Paris sorti en 1993. Premier constat: la setlist fait largement l’impasse sur les productions récentes de Smith et ses compères. Etalé sur 2 CD, Bestival Live 2011 porte finalement bien son nom: il fonctionne d’abord comme une sorte de best of, le meilleur ou le plus connu du groupe emblématique de la new wave. Tous les tubes sont donc là. Y compris The Caterpillar, rarement joué sur scène. Y compris, aussi, l’initial Killing An Arab, transformé depuis un petit temps en Killing Another, la référence littéraire ( l’Etranger, de Camus) n’étant plus suffisante pour dissiper les éventuels amalgames. La liste de hits est encore longue: Close To Me, Just Like Heaven, Boys Don’t Cry, The Lovecats, en passant par le quasi funk Hot! Hot! Hot!… Autant de fulgurances pop brillantes qui nuancent l’image crépusculaire de The Cure. Sans l’évacuer pour autant. Le concert débute ainsi avec Plainsong, sommet mélancolique imparable. Les plus « gothiques » se reconnaîtront également dans la raideur glacée de Play For Today, One Hundred Years, tandis que le classique A Forest continue de créer l’hystérie.

Bien sûr, il est étrange d’entendre le quinqua Robert Smith continuer à croasser le spleen ado comme s’il avait encore 17 ans. Mais il a aussi toujours prouvé que, même étroite, la fenêtre de tir permettait plus d’une variation. C’est un peu ce que démontre la diversité de ce Bestival, sur lequel comptines pop et morceaux de bravoure cold wave cohabitent sans que cela gêne. Une manière de rappeler également que The Cure reste un groupe à part, dont la position isolée, voire « isolationniste », l’aura finalement plus aidé que desservi.

LAURENT HOEBRECHTS

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