Tête de tambour

Scène de ménage dans une famille: le père qui récure une casserole en rythme et scande les reproches qu’il adresse à son fils, adulte; le fait de n’avoir pas de travail, de vivre toujours chez ces parents et de ne rien faire pour y remédier. Il s’oppose en cela à la mère bouclier-protecteur, et protectrice de sa progéniture qu’elle enveloppe, emprisonne de son amour. Manuel, lui, finit par exploser, claque la porte, laissant ses vieux à leur dispute pour s’évader dans les effluves du bar tout proche. De cette scène originelle, stupéfiante, sinon primitive, se répand, comme une tache d’huile, l’histoire d’une schizophrénie, ou plutôt d’un schizophrène, d’un homme que la maladie met à mal et qui à son tour se déchaîne sur son environnement familial. Manuel souvent, Anaël parfois, se débat contre la camisole invisible de la maladie, des médicaments, se fait ignoble en révolte contre sa dépendance à ses géniteurs, à sa soeur Ana-sol. Seule l’apaise la présence de sa petite nièce, Soledad, rai de lumière aveuglante au milieu de trou noir de sa « folie ». Premier roman percutant et strié de fulgurances, Tête de tambour, signé Sol Élias, se déroule principalement dans celle diffractée de Manuel-Anaël dont les frasques, la méchanceté odieuse ne sont qu’un immense appel à l’aide. Dans sa monstrueuse humanité, le récit de cet homme bipolaire ne laisse pas indifférent.

de Sol Elias, éditions Rivages, 197 pages.

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