Sur les toits

Avec son premier roman, en 2013, il avait squatté les sélections du Goncourt, avant de flancher, sur le fil, face à Pierre Lemaitre. Les gueules cassées de la Grande Guerre balayaient ainsi les fous d’opérette de Frédéric Verger, confrontés à l’invasion nazie. Pour autant, l’auteur n’a pas abandonné l’idée de raconter la Seconde Guerre par les marges, installant ici son action sur les toits crevés d’une Marseille dont les rues palpitent au rythme des événements. Une manière futée, poétique, de gagner en hauteur de vue pour présenter tout un peuple précarisé, certes, mais surtout gagné par  » l’ivresse des toits« : bohémiens, tire-laines, vagabonds, et surtout une troupe de gamins (d’au-dessus) des rues, percevant des sommets les bruits de la ville tout en craignant sans cesse d’être les premiers servis par les bombes. Une histoire parallèle se dessine ainsi, à laquelle deux gamins candides, à la recherche de leur mère et flanqués d’un volatile en cage, vont se frotter sans mesure. Avec son lot d’angoisses, d’amours et de trahisons, dans une oscillation permanente entre féerie et cauchemar. Là où Verger atteint tout particulièrement sa cible, c’est quand il s’attache à multiplier les portraits hauts en couleur d’alliés d’une heure ou de plusieurs années, de survivants massés en bandes improvisés et dortoirs précaires, de tueurs, traqueurs ou héros jouant leur partition en solo -animés qui par l’appât du gain, qui par une éducation sentimentale express, qui par la subordination de sujets en guenilles, qui par la survivance d’une noblesse de coeur malgré la famine.

De Frédéric Verger, éditions Gallimard, 400 pages.

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