Philippe Cornet
Philippe Cornet Journaliste musique

UNE INTÉGRALE DES QUATORZE ALBUMS SOLOS RAPPELLE L’ÉBLOUISSANT TALENT DE PAUL SIMON. FOCUS SUR LES DEUX PREMIERS DU LOT, DATÉS DE 1965 ET DE 1972.

Paul Simon

« The Complete Albums Collection »

DISTRIBUÉ PAR SONY.

10

L’oeuvre « adulte »de Simon et ce box donc, comprennent des disques aussi brillants que Still Crazy After All These Years (1975), One-Trick Pony (1980), Hearts And Bones (1983), sans oublier le doublé world où le petit New-Yorkais (1m60) explore respectivement l’univers sud-africain (Graceland, 1986) et celui du Nordeste brésilien (The Rhythm Of The Saints, 1990). Sans ces derniers, des groupes tels que Vampire Weekend planteraient encore leurs choux dans le Upper West Side. L’oeuvre présentée dans cette intégrale de douze disques studio et deux live est l’équivalent des Suites de Bach ou des travaux de Lennon-McCartney, pas moins. Au-delà de ces raisons justifiant amplement l’acquisition de ce coffret, même pour 100 euros (prix moyen), on garde un faible pour les deux premiers albums.

Cimes parfumées

The Paul Simon Songbook paraît à l’été 1965 alors que le chanteur -qui va avoir 24 ans- a quitté les Etats-Unis pour Londres. Son premier album avec Garfunkel, sorti l’année précédente, n’a eu aucun succès et Simon rode dans les clubs anglais à la recherche d’inspiration nourrissant une constante fièvre musicale. Un demi-siècle plus tard, les douze titres de ce solo initial paraissent comme l’expression d’une maîtrise déjà vertigineuse de la composition. Mathématique, berceuse, sensuelle. Une poignée de chansons connaîtront d’abord la gloire avec Garfunkel, mais entendre I Am A Rock, The Sound Of Silence, Kathy’s Song portés par la seule voix de Simon et son insidieuse mélancolie constitue un ravissement. Il règne ici un sens velouré de la solitude et de la résistance romantique au temps: le talent affleure aussi sur A Church Is Burning, Leaves That Are Green ou le très dylanien A Simple Desultory Philippic. Le disque n’eut aucun impact commercial à sa sortie, contrairement à notre deuxième choix perso issu du box: l’éponyme album Paul Simon. A sa parution, en janvier 1972, Simon a déjà connu le parcours étincelant puis la séparation acrimonieuse avec Garfunkel. Ce Paul Simon expose donc son auteur, libéré, en état de grâce, même si l’amertume d’un (autre) mariage vacillant inonde les chansons (Run That Body Down, Congratulations), une fois de plus charpentées par des textes de grande qualité. Sans oublier son folk primal, Simon débute ici d’autres aventures soniques, s’entourant du jazzman Ron Carter et du percussionniste brésilien Airto Moreira. Il y a entre autres le tube reggae Mother And Child Reunion -l’une des toutes premières tentatives « blanches » du genre- et ce Duncan, irrésistiblement porté par les flûtes andines de Los Incas vers des cimes parfumées. Un autre grand disque de Monsieur Paul à (re)découvrir dans ce box parfait.

PHILIPPE CORNET

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