Si Beale Street pouvait parler

Écrit par James Baldwin au mitan des années 70 dans sa retraite de Saint-Paul-de-Vence, Si Beale Street pouvait parler fait aujourd’hui l’objet d’une réédition bienvenue à la faveur de la magistrale adaptation cinématographique qu’en signe Barry Jenkins ( lire notre dossier pages 10 et suivantes). Soit, dans le Harlem de l’époque, l’histoire de Tish et Fonny, deux jeunes Noirs de 19 et 22 ans qu’unit un amour d’une absolue pureté, partis pour une vie de bonheur ensemble si l’Amérique et ses préjugés racistes ne s’en mêlaient. Et d’expédier le garçon en prison pour le viol d’une Portoricaine qu’il n’a même jamais croisée, ses proches remuant ciel et terre pour l’en extirper, sa compagne enceinte la première. L’écriture de Baldwin est portée par une énergie féroce, sa langue adoptant un flux parfois proche du slam, où l’économie le dispute à la fulgurance. Mais s’il a la critique aiguisée – « Il n’était le nègre de personne. Et ça, c’est un crime dans cette pourriture de pays libre »-, le récit vibre aussi d’une fibre mélodramatique, à l’unisson des sentiments de Tish. Un roman d’une beauté rageuse et sensuelle, partition douloureuse et déchirante célébration d’un amour seul à même de résister au désespoir, aux démons de l’Amérique et au chaos du monde. Et, pourquoi pas, de réveiller les morts…

De James Baldwin, Éditions Stock, Traduit de l’anglais (États-Unis) par Magali Berger, 256 pages.

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