Monk’s Dream

© GETTY IMAGES

Magnifique album de Thelonious Monk, Palo Alto est aussi l’oeuvre d’un adolescent de seize ans qui fut l’organisateur du concert et de sa captation.

En 1968, l’année de tous les dangers aux USA, Thelonious Monk, pianiste génial et atypique, personnage excentrique et lunaire, arrive au bout d’une carrière de plus en plus imprévisible et qui commence commercialement à battre de l’aile. Alors que la rock music est en train de tout emporter sur son passage et que le jazz, bousculé par le free, entre dans une nouvelle ère qui le voit devenir électrique, Miles Davis en tête, Monk reste imperturbablement le même malgré les tentatives de la Columbia d’essayer de rafraîchir son image -voir l’ahurissante pochette de son ultime album pour le label, Underground, où le musicien déguisé en résistant français secondé par un affriolant modèle, y joue du piano à un officier allemand ligoté comme un saucisson!

Pourtant, l’un des inventeurs du be-bop (le seul, prétendait-il), alors même que les ventes de ses disques connaissent une chute radicale, reste une icône qu’adulent aussi des générations bien plus jeunes. C’est d’ailleurs un de ses fans, âgé de 16 ans, qui va organiser le concert de Palo Alto et cela sans douter un instant d’arriver à ses fins. Passionné par la musique noire américaine, Danny Scher, lycéen et batteur d’un groupe de jazz (il deviendra, par la suite, organisateur de concerts), contacte le manager de Monk qui doit se produire dans un club de la ville quelques jours plus tard. Comprenant qu’il peut faire un double coup financier, ce dernier accepte la proposition du lycéen mais en limitant le concert à une heure -il durera en fait 47 minutes.

Monk's Dream

En homme d’affaires avisé, Danny va inonder la métropole californienne d’affiches où, pour faire bonne mesure, figurent aussi deux groupes de rock. Ce sera donc devant une salle pleine, jeune et enthousiaste, que Monk va dérouler l’immuable répertoire ( Ruby My Dear, Well, You Needn’t, Blue Monk, Epistrophy et autres) qui est désormais le sien. L’enthousiasme communicatif des spectateurs va galvaniser les musiciens (le batteur Ben Riley, le bassiste Larry Gales et le saxophoniste Charlie Rouse), Monk, lui-même, délivrant là une de ses dernières grandes performances publiques. Un demi-siècle plus tard, Palo Alto, disque tombé du ciel, se révèle être l’un de ses meilleurs enregistrements live. La prise de son est au top même si la bande magnétique à, elle, techniquement souffert mais sans que cela ne vienne gâcher la fête.

Thelonious Monk

« Palo Alto »

Impulse! 7112844 LP/ disponible aussi en CD.

9

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content