GUILLAUME GALLIENNE RÉUSSIT UNE ÉPATANTE COMÉDIE À LA PREMIÈRE PERSONNE, DE CELLE DE L’ACTEUR DÉCOULANT LA NAISSANCE D’UN RÉALISATEUR.

Les Garçons et Guillaume, à table!

DE ET AVEC GUILLAUME GALLIENNE. AVEC ANDRÉ MARCON, FRANÇOISE FABIAN, DIANE KRUGER. 1 H 27. DIST: COMING SOON.

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Plus de deux millions d’entrées en France, et cinq César, dont ceux du Meilleur film et du Meilleur acteur: Les Garçons et Guillaume, à table! restera comme l’un des événements cinématographiques de l’année écoulée. Et ce, même si sa razzia sur les compressions fut favorisée par les polémiques ayant assorti La Vie d’Adèle, le chef-d’oeuvre d’Abdellatif Kechiche, privant sans doute celui-ci d’un couronnement attendu. Mais soit, l’on ne réécrira pas l’histoire, et pour ses débuts à la réalisation, Guillaume Gallienne signait un épatant film à la première personne, contribuant en outre, au même titre qu’un Albert Dupontel (Neuf mois ferme), à redessiner les contours de la comédie d’auteur à la française.

Coming out inversé

Inspiré de son spectacle éponyme créé au théâtre de l’Ouest parisien, à Boulogne-Billancourt, Les Garçons et Guillaume, à table! raconte l’histoire d’un coming out inversé, celui d’un garçon devant assumer son hétérosexualité dans un environnement grand bourgeois ayant décrété, sa mère omniprésente en tête, qu’il était homosexuel. La longue suite de malentendus qui en résultent, Gallienne les met en abîme avec un aplomb, un humour et une intelligence jamais pris en défaut, si bien que la chronique, largement autobiographique (et nourrie d’une solide dose d’autodérision), se révèle en tous points hilarante. Si l’auteur y paie généreusement de sa personne, campant en plus de son propre personnage, celui de sa mère –« plus castrée que castratrice », nous disait-il- en une rencontre aussi explosive que jubilatoire, ce n’est pas là, toutefois, l’unique piment d’une comédie osant les clichés, cinématographiques et autres, comme pour mieux s’y dérober. La liste en serait trop longue pour les énumérer ici, le film ayant aussi pour programme de torpiller les étiquettes dans son approche du thème de l’identité. Partant, et quoique parcourant avec bonheur toute la gamme de l’humour, du plus potache au plus subtil, l’histoire n’est pas du ressort exclusif de la farce. Mieux même, prolongeant le théâtre de sa vie dans un numéro de travestissement(s) à répétition, l’acteur-réalisateur investit, l’air de rien, une zone sensible, jusqu’à dispenser une émotion profonde.

Sous le titre De la scène à l’écran, un making of retrace l’histoire du projet par le menu, du jour où Olivier Meyer proposa au sociétaire de la Comédie-Française de créer un one man show sur scène. Et comment, ne se voyant guère décliner du Proust accompagné à la harpe (sic), ce dernier conçut, en guise de carte blanche, un spectacle à caractère intimement personnel dont Isabelle Adjani devait lui dire que « c’était impressionnant à quel point on y assistait à la naissance d’un acteur. » A quoi Gallienne aura ajouté, avec un allant incontestable, celle d’un réalisateur…

JEAN-FRANÇOIS PLUIJGERS

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