Maxiplotte
Les années 90 ont été marquées par le désir d’indépendance des auteurs de bande dessinée, au vu du manque d’ouverture d’esprit des éditeurs de l’époque. Julie Doucet, autrice québécoise, en était déjà à plus d’un fanzine auto-édité. Elle va en foutre plein la gueule de ce côté-ci de l’Atlantique avec son Dirty Plotte, littéralement « zézette sale ». Ses histoires racontent pour la première fois en bande dessinée les menstruations et les contraintes y afférant. Elle parle aussi du harcèlement de rue qu’elle subit et de la manière violente avec laquelle elle punit les vilains. Elle décrit d’autre part la jalousie maladive ou l’attitude puérile de certains de ses mecs. Mais elle peut raconter également dans des récits oniriques ses amours midinettes contrariées. Sans parler de féminisme, elle s’attaque à son quotidien en tant que femme comme peu d’autrices l’ont fait à l’époque. Si ses histoires paraissent sombres, accentuées par un dessin noir et blanc expressif, elles n’en sont pas pour autant dénuées d’humour. Les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître Julie Doucet pour la bonne raison que celle-ci a arrêté la bande dessinée en 1999, poursuivant sa route dans une direction plus « artistique ». Son mode de narration étant devenu plus expérimental, les éditeurs BD du début des années 2000 ne l’ont pas suivie. » Si j’avais fait de la bande dessinée dans le contexte d’aujourd’hui, probablement que je ne l’aurais pas quittée!« , rappelle-t-elle dans l’entrevue qui clôt l’ouvrage, prouvant, s’il était encore nécessaire, que l’autrice était en avance sur son temps. Sachons gré à L’Association, jeune maison d’édition à l’époque, de rééditer aujourd’hui les deux albums épuisés, complétés de carnets et autres histoires inédites. À redécouvrir!
De Julie Doucet, éditions de L’Association, 400 pages.
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