Au tournant des années 10, son personnage de dandy burlesque, élégant et séducteur devait faire de Max Linder (de son vrai nom Gabriel Leuvielle) la plus grande star d’un cinéma encore balbutiant, ses frasques, débitées dans les films qu’il enquillait pour Pathé, connaissant un succès planétaire et inspirant jusqu’à Charlie Chaplin. Succès aussi fulgurant qu’éphémère, cependant, le destin se refermant sur l’artiste, gazé pendant la Grande Guerre et dépressif chronique, qui devait entraîner sa femme en même temps que lui dans la mort un matin de Toussaint, en 1925, avant d’être rattrapé par l’oubli, une dizaine de ses films à peine ayant échappé à la destruction(1). Cette existence chahutée et rocambolesque, Stéphane Olivié Bisson l’évoque aujourd’hui dans un premier roman adoptant la forme de confessions intimes adressées alternativement par la star à sa fille Maud (seize mois au moment de sa disparition) et à sa femme Hélène. Un récit conduisant de Saint-Loubès, dans le Bordelais, où ses aspirations ne lui valent que réprobation familiale, au Max Linder Panorama du boulevard Poissonnière à Paris, vestige de sa gloire passée, avec détours par Hollywood et ailleurs. Et un voyage au pays des ombres, de l’écran que Linder éclairait de poésie assortie de ce qu’il fallait de folie, à « cette villégiature définitive, ce grand désert bordé par rien, où l’on ne rencontre que des morts, de simples corps qui marchent du matin au soir ». « Max au bord de la noyade.  » Ç’aurait pu être le titre d’un film mais ce fut ma vie! », au coeur d’un hommage aussi vibrant que délicatement hanté.

De Stéphane Olivié Bisson, Éditions Cambourakis, 104 pages.

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(1) Un coffret publié par les éditions Montparnasse salue le génie comique de Linder à travers dix courts métrages et En compagnie de Max Linder, un montage de ses films américains conçu par sa fille Maud.

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