DE JEAN-PIERRE DARDENNE, LUC DARDENNE. AVEC CÉCILE DE FRANCE, THOMAS DORET, JÉRÉMIE RENIER. 1 H 27. SORTIE: 18/05.

Son vélo lui manque, au foyer où il se trouve placé sans intention aucune d’y rester longtemps. Son père lui manque encore plus, même si c’est lui qui l’a fait mettre là, faute de pouvoir assumer sa progéniture. Et comme le père doit avoir gardé le vélo, Cyril s’échappe pour retrouver l’un et l’autre. Le garçon de presque 12 ans n’a pas froid aux yeux. Il est déterminé. Il retrouvera le vélo, qu’il pense avoir été volé. Car jamais papa ne l’aurait vendu! Pourtant, la vente a eu lieu. Vérité dure à encaisser, que le gamin admet difficilement. Jusqu’à ce qu’une jeune femme lui rapporte la bicyclette au foyer qu’il a réintégré. Son geste généreux n’appelle pas de suite. Mais Cyril en décidera autrement…

Apre et déchirant comme le manque d’amour, tendre au c£ur comme une promesse d’avenir, captivant comme un thriller à suspense et bouleversant comme ces films néoréalistes italiens centrés sur l’enfance, Le Gamin au vélo poursuit sur un mode lumineux l’£uvre profondément humaniste des Dardenne. La maîtrise formelle des frères se coule dans une action souvent rude et parfois violente, mais filmée avec une rare fluidité, et ce quelque chose d’indicible et de pourtant palpable qu’on pourrait appeler la grâce. Une grâce ne renvoyant pas à la religion, mais à un réel dont le film ne masque aucune aspérité, mais sans aucun misérabilisme, sans céder au vertige du désespoir et en faisant le pari de l’humain dans ce qu’il a de meilleur.

En Thomas Doret, les Dardenne ont trouvé l’interprète idéal de Cyril. Dur à fleur de peau, touchant dans ses élans, il allie une très remarquable présence caméra et une justesse d’expression dont les frères tirent un parti magnifique. Cécile de France est radieuse dans un personnage féminin à la fois protecteur et complice, mais aussi balise affective et morale pour un gamin en grand danger dans un monde carnassier. Jérémie Renier incarnant le père démissionnaire, nouvelle déclinaison d’un thème paternel hantant décidément l’£uvre des frères liégeois. Qu’on songe -dans l’ordre- à La Promesse, au Fils et à L’Enfant

Chose nouvelle chez les Dardenne, la musique joue un rôle important, quelques courtes mais poignantes ponctuations beethoveniennes, qui rappellent certains accents de Bach chez Pasolini. La musicalité du Gamin au vélo prenant plus d’une forme, bien au-delà des rares (mais sublimes) notes posées à 4 reprises sur ses images. Il y en a aussi, de la musicalité, dans cette façon de faire circuler le nouvel opus dans la filmographie des frères. Car Cyril pourrait être le bébé de L’Enfant devenu grand. Et quand on le voit rouler sur son vélo, vêtu de rouge, on croit apercevoir le fils de La Promesse sur son vélomoteur… Comme une rime discrète, une touche d’harmonie, une résonance précieuse. l

L.D.

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