EN PLUS D’ENREGISTRER DES DISQUES, ÉMILE SORNIN A TOURNÉ UNE DIZAINE DE CLIPS ET CINQ OU SIX PUBS. PERMIS POIDS LOURD.

Avant de taper dans notre oreille avec la musique baroque, psyché mais pas que, de Forever Pavot, Émile Sornin avait déjà visé l’oeil. Ses projectiles? Des clips plutôt dingos pour Cut Copy, Disclosure, Alt-J et Dizzee Rascal… « Les tout premiers trucs que j’ai tournés, c’était des courts métrages. Mon frère filmait. Baptiste est comédien et vit depuis quinze ans en Belgique. Il joue pas mal avec les Dardenne mais fait surtout beaucoup de théâtre. Gamin, il rêvait de réalisation et donc, moi, je me retrouvais dans ses films. Des bazars d’espionnage, des histoires de braquage. On vient d’en retrouver un: Les Sang Pitié. Je dois avoir huit ou neuf ans. Dans l’une des scènes, je suis déguisé en vieille et danse sur du Michael Jackson. »

À douze ou treize piges, Émile suit avec ses copains l’exemple du frangin. Il tourne des séries Z, des films de ninjas… Et à 18 ans son premier clip, en pâte à modeler et stop motion, pour un morceau, Twin Chevron, de:(. Prononcez Colon Open Bracket. C’est celui de Fish & Chips pour Sheraff, en 2010, qui lui servira de carte de visite. « Je l’ai réalisé avec trois potes. Tout était filmé sur fond vert. On a construit les décors en 2D et 3D. Une femme à barbe accouche d’un enfant qui sort de sa chatte en moto avec une énorme barbe et des tatouages. C’est donc l’histoire de ce petit garçon qui va se promener dans un monde un peu imaginaire. Grâce à cette vidéo, j’ai rencontré mon producteur, qui m’a proposé de bosser sur des trucs ensemble. Un an après, je faisais mon premier clip pour Cut Copy. Le premier surtout avec un budget et une vraie production derrière. » Dizzee Rascal, Alt-J, Naive New Beaters, Jamaica… Les commandes depuis se sont enchaînées. Même si le dernier, pour The Shoes, commence tout doucement à dater. Sornin l’a tourné il y a un an et il est sorti en janvier. « Le clip de Disclosure dont je suis superfier – je pense d’ailleurs que je ne ferai jamais mieux- s’est fabriqué dans une ambiance géniale, hyperdrôle. Mais The Shoes a été très dur. Et Dizzee Rascal dans la douleur totale parce que plein de trucs ne marchaient pas. »

Homme pressé

Les exemples de clippeurs devenus célèbres à Hollywood ne manquent pas. Mais Émile Sornin est loin de rêver de cinéma.

« Tous les gens que je croise, les réals’ de ma boîte, aspirent à faire des films. Mais pour l’instant, je ne m’en sens pas les épaules. C’est déjà tellement compliqué et fatigant de gérer un clip ou une pub. Faut pas croire. C’est un combat. Loin de l’expérience cool que tu peux imaginer. Alors, me lancer dans un projet de trois ou quatre ans, je ne le sens pas du tout. J’aime bien avoir de petites idées et les concrétiser rapidement. En musique, c’est pareil. J’ai du mal à prendre mon temps pour un disque. Mais il faut. Parce qu’il n’y a rien de pire qu’un type qui se dépêche. Et c’est encore plus nul quand c’est par intérêt. »

Sornin a quelques idées de courts qu’il réalisera peut-être un jour. Mais le cinéma, le peu de ses copains qui s’y sont frottés l’en ont dissuadé. « Ils ont bossé des années parfois sur des trucs qui ne sont jamais sortis. Dans le clip, la pub déjà, faut faire des concessions. Ranger un peu sa fierté, ses idées parfois. Tu te retrouves à faire un quart de ce que tu espérais et tu es superdéçu. C’est la raison pour laquelle je me suis vachement calmé. »

J.B.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content