Nurten Aka
Nurten Aka Journaliste scènes

entre Dada et Duchamp, Laurent d’Ursel accouche de « loeuvrettes » et tente de secouer la place publique en manifestations faussement farfelues.

« Tu veux que je te montre mon cul? »  » Non.«  » Mais regarde donc, lis à voix haute« … « Merde! », se dit-on en voyant tatoué sur son cul l’Article 1er (corrigé) de la Constitution belge, « quel gâchis pour ses fesses (et sa compagne!). » Lui: « On a passé 3 minutes magnifiques, non?… En art, peu importe, il doit se passer quelque chose. » Sympathique comme un ado curieux, on rencontre Laurent d’Ursel en phase jubilatoire. Ce Bruxellois de 51 ans est un poète protéiforme, performeur, branché art contemporain. Peu prennent le temps de fouiller son univers, de comprendre l’artiste, de dépasser le « provocateur ». Faut dire qu’avec son collectif Manifestement, Laurent d’Ursel est connu pour organiser des manifs inclassables, prévues jusqu’en 2027. Titres-thèmes farfelus: Vive la police!, Y a trop d’artistes!, Les femmes nous gonflent, Pour le rattachement de la Belgique au Congo… La prochaine en date? Ce 31 décembre2010: Venez applaudir les SDF. Pour enterrer en beauté l’année européenne de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale! (sic) Une dénonciation artistique. « On n’est pas résistant militant », dit-il. « C’est de l’art contemporain, extrêmement réfléchi, forme et contenu. Il n’y a ni provoc’, ni amusement organisés. Le côté joyeux vient en surplus. On va donner la parole aux vrais SDF. C’est eux qui feront la manifestation. On est là pour organiser et soutenir. »Le collectif fonctionne à l' »enthousiasmocratie » d’une cinquantaine de membres. Le QG? La Loeuvrette Factory, l’atelier de l’artiste, à l’arrière d’une maison chaleureuse du quartier populo de la Gare du Midi à Bruxelles.

Courant d’air contemporain

Le comte d’Ursel, coincé parfois par ses origines, a très tôt quitté et le milieu aristo (mais pas sa famille) et la religion – » la vie est plus intéressante si on fait l’hypothèse que Dieu n’existe pas. » Jeune, il se dit écrivain, amoureux de son contemporain Eugène Savitzkaya mais aussi de Flaubert, étudie l’économie et la philo, galère à publier un roman sur les… « grelots ». Puis il fonce dans l’art plastique, et crée des « loeuvrettes », « petites £uvres », vanités baroques ou « cadavres exquis » (entre dada et ready-made). En marge des gros circuits, il expose et vend de temps en temps.  » Ma vie est une série d’échecs« , souligne ce  » monstre d’enthousiasme« , parfois au bord du gouffre de quelques (vraies) dépressions, allergique à la mode zen: » L’ennui est mon ennemi privé numéro 1. Je prends mon pied à ne pas être calme. » Complexe sous la légèreté, se méfiant des avis bruts qui reposent sur des sensations (irréfléchies), Laurent d’Ursel ne se comprend pas en une rencontre. Dans son bureau, Spinoza et Artaud semblent passer dans les environs, pourtant c’est Sempé et Coluche qui traînent à table. Vieil ado de 51 ans, Laurent d’Ursel est un excentrique qui se vit comme  » un courant d’air contemporain« . En attendant une prochaine exposition, prenez le temps de voyager sur ses sites www.manifestement.be et www.loeuvrette.be. l

Nurten Aka

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