La Vespasienne

Hiver 1941-1942, Paris est occupé par les Allemands. Les Parisiens aisés, nombre d’intellectuels et les lâches ont quitté la capitale pour se réfugier en zone libre. Restent les paumés, quelques idéalistes et les sans-opinions. C’est le cas de Paul-Jean Lafargue, directeur de la Revue des lettres, persuadé que la poésie peut encore sauver le monde. Ami d’un officier allemand, poète épris d’une culture sans frontières, il participe aussi à des réunions aux relents fascistes. Déchiré entre son oeuvre et sa misogynie, le directeur passe son temps libre à observer les allées et venues des usagers de la vespasienne en face de chez lui. En parfait plumitif sournois et frustré, il note tout: les heures, les déplacements, les collusions, les manèges scabreux… Et progressivement, on se rend compte que cette vespasienne est plus qu’un urinoir: elle est l’allégorie de la fin d’une époque, de la débâcle des valeurs morales et un véritable lieu de mémoire et de liberté. La petite vie étriquée de Lafargue s’anime enfin devant ce lieu où  » l’on partageait des fluides, on se polluait, on se souillait mutuellement ». À la fois drôle et cruel, ce roman propose un point de vue original: la Seconde Guerre mondiale analysée au travers d’une pissotière. On est loin de la littérature sud-américaine, dont Sébastien Rutés est un spécialiste.

de Sébastien Rutés, Éditions Albin Michel, 224 pages.

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