La reine Judi

Qui d’autre que Dame Judi Dench, trônant sur le cinéma britannique du haut de ses 50 ans et quelques de carrière, pour incarner la reine Victoria? Poser la question, c’est déjà y répondre. À tel point d’ailleurs que la comédienne n’a pas attendu l’appel de son vieux complice Stephen Frears pour s’y risquer, elle qui campait déjà son altesse royale dans Mrs Brown, de John Madden, il y a tout juste 20 ans, une de ses sept nominations aux Oscars à la clé (dont l’une, pour Shakespeare in Love, du même Madden, couronnée de succès). Victoria & Abdul pourrait bien lui en valoir une nouvelle, tant il y a là un rôle taillé pour les honneurs -encore que l’on devine, alors qu’on la retrouve dans un palace vénitien, que ce n’est pas là ce qui la motive: « Souvent, on a tendance à vous proposer des rôles voisins de ceux que vous avez interprétés. Et c’est la dernière chose que l’on a envie de faire. Je n’arrête pas de dire à mon agent: « Je t’en prie, trouve-moi un rôle où le personnage apprend à marcher sur une corde raide, avant de se transformer en dragon dans l’acte final. » On cherche toujours quelque chose de différent, ce que j’ai connu par exemple avec Notes on a Scandal, avec Cate Blanchett, absolument passionnant.« Et cela même si elle retrouve dans le cas présent un personnage qu’elle avait déjà interprété: « C’est la même personne, mais pas le même rôle, souligne-t-elle. Et une période dont personne ne savait rien, avec en conséquence quelque chose de totalement nouveau à explorer et à essayer de comprendre. Et comme j’ai son âge…(soupir) L’autre jour, j’ai vu mon petit-neveu. Il m’a montré son nouvel appareil photo dont il me disait que non content de prendre ma photo, il lui donnerait mon âge. Ce qu’il a fait, et je me suis trouvée rajeunie de 20 ans. Je lui ai dit qu’il me le fallait absolument…« (rires)

Entre celle qui fut l’inaltérable M dans une autre vie de cinéma et Stephen Frears, la complicité remonte au début des années 80 déjà, et Going Gently, une dramatique télévisée produite pour la BBC 2. C’est dire si, quelques collaborations plus loin (le téléfilm Saigon – Year of the Cat, Mrs Henderson Presents et Philomena), ces deux-là se comprennent à demi-mot, ce qui est utile avec un réalisateur préférant les monosyllabes aux longs discours: « Nous avons adopté un langage sténographique. À la fin d’une prise, je le regarde, et soit il s’éloigne, soit il me demande: « Veux-tu qu’on la refasse? » Ce qui signifie bien sûr qu’il souhaite lui-même la refaire. Mais c’est charmant d’avoir cette façon de procéder…« Quant à savoir où cette actrice shakespearienne -elle débuta sur les planches en étant l’Ophélie de Hamlet– puise cette énergie qui la conduit à se multiplier encore et toujours sur les écrans (on la retrouvera tout prochainement dans Murder on the Orient Express)? « C’est héréditaire, sourit-elle. Mes parents l’avaient et j’ai eu la chance de l’avoir par nature. Et puis, je compte parmi les privilégiés qui font un métier qu’ils aiment vraiment. Nous ne sommes pas si nombreux…« 

J.F. PL.

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