De La Femme à Lescop en passant par Aline ou Violence Conjugale, qui, selon la légende, s’est vendu au label Born Bad en lui faisant gober qu’il avait retrouvé de vieilles bandes des années 80, nombre de groupes français d’aujourd’hui s’inspirent des claviers et de l’ambiance froide des eighties. De la cold et de la synth wave hexagonales. « Ces musiciens n’étaient parfois même pas nés à l’époque, sourit Jean-François Sanz, réalisateur du documentaire Des jeunes gens mödernes et commissaire de l’exposition qui lui a donné naissance.

« Pour Etienne Daho, qui est un peu le parrain de notre docu, l’expo, le livre, la compilation ont fait office de catalyseur. On a réalisé un gros travail d’enquête et exhumé pas mal de choses, mais les archives et la musique sont beaucoup plus accessibles qu’à l’époque. Moi, je pense surtout qu’il y a une question de cycle. Quand j’étais mioche, j’écoutais les disques de mes parents. C’est normal. On se replonge dans la créativité des générations passées. Et celle qui s’agitait entre 1978 et 1983 était porteuse de créativité et de liberté. »

En juillet 2014, à l’occasion du festival parisien Days Off et d’une soirée intitulée « Tombés pour la France », Daho a rassemblé pas mal de rejetons reprenant ses chansons, celles de Jacno ou interprétant leurs propres compositions. Une façon de boucler la boucle. Comme quand La Femme revisite Marie et les Garçons…

« Il y a une noirceur dans ces trucs eighties qui nous plaît bien. Mais si on apprécie Taxi Girl, on adore plein d’autres trucs plus anciens comme le Velvet, Kraftwerk, les zazous et les yéyés », confiaient-ils il y a trois ans, juste avant la sortie de leur premier album Psycho Tropical Berlin.

« Début des années 2000, c’était le règne du digital et du numérique, reprend Sanz. Les gens ont commencé à en avoir marre des sons trop parfaits. Ils sont partis chercher de la « nouveauté » dans les synthés analogiques, ces objets cultes du passé qui s’achètent maintenant très cher sur le marché de la seconde main mais qui ont une âme. »

Invention visuelle, sens du marketing, du design et du do it yourself (on se souvient des mêmes La Femme réalisant que certains de leurs CD-R tout juste vendus étaient vierges)… Les points communs ne se limitent pas à une vague noirceur.

Longtemps restés barrés, eux, aux portes de la pop culture, les jeunes gens mödernes sont aussi parfois qualifiés de « proto french touch ».

Très vite, l’électro a ainsi fasciné Daho. Etienne, comprenant que les remixes étaient parfaits pour lui ouvrir les portes des clubs, s’est intéressé à William Orbit avant qu’il remixe Blur et Erasure, que Björk et Madonna s’arrachent ses services. Les jeunes gens mödernes, venus de milieux plutôt confortables, partageaient d’ailleurs globalement un même univers social et patrimonial avec les Versaillais de la dansante touche française… Synthés, bonheur.

J.B.

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