RÉALISÉ À VALENCE, EN FRANCE, AU SEIN DU STUDIO FOLIMAGE, UNE VIE DE CHAT EST AUSSI UNE AVENTURE BELGE PAR BIEN DES ASPECTS, DE LA PRODUCTION À L’ANIMATION. RÉCIT…

S’il porte clairement la griffe du studio français Folimage, dont il constitue le troisième long métrage, après La prophétie des grenouilles et Mia et le Migou, réalisés tous 2 par Jacques-Rémy Girerd, Une vie de chat de Jean-Loup Felicioli et Alain Gagnol est aussi, à de nombreux égards, une aventure belge. Entamée au stade de la production, avec la participation de Digit Anima côté francophone, et de Lunanime, côté néerlandophone, la collaboration s’est ensuite étendue à de nombreux départements, de l’animation à la postproduction. « Mon intérêt remonte à 2007, lorsque le projet a été présenté au Cartoon Movie de Potsdam, explique Annemie Degryse, de Lunanime. Au départ, j’étais surtout intéressée en tant que distributrice. Et puis, l’idée d’une coproduction, à hauteur de 10 % (pour un budget global de 5 millions d’euros, ndlr) a vu le jour. »

Histoire de chats

Pendant de cette participation, une authentique Belgian Connection se met alors en place, avec notamment l’animation de 18 des 64 minutes que compte le film en Belgique, entre Bruxelles et Gand. « Obtenir une partie de l’animation n’avait pourtant rien d’évident », poursuit-elle, allusion au fait qu’Alain Gagnol voulait surveiller le processus de fort près. Ce que confirment, en ch£ur, les réalisateurs du Studio l’Enclume, à Bruxelles. Créé en 2007 par 4 étudiants sortis de La Cambre, le collectif artistique, qui combine réalisations propres et prestations sur des projets de commande, s’est déployé sur différents terrains -générique pour Anima, clip pour Hooverphonic, court métrage De si près, réalisation des séquences animées du documentaire Black Diamond, sur les écrans début 2011, et on en passe, comme la série du Chat (décidément!) de Geluck, dont la réalisation en pâte à modeler est annoncée pour l’an prochain également.

Rien de comparable, cependant, à cette expérience sur Une vie de chat: « Nous avons passé 3 semaines de formation à Valence. Il fallait s’adapter au style graphique, mais aussi aux exigences particulières des réalisateurs. Ils avaient une idée très précise de ce qu’ils voulaient, qu’il nous a fallu respecter. Nous avons dû nous insérer dans une production en cours, nous adapter à elle et accepter d’être un maillon dans une chaîne. »

Avec ce que cela suppose comme frustration éventuelle, compensée, toutefois, par la qualité de l’apprentissage, et plus encore. « J’avais adoréLes tragédies minuscules, se souvient Jérémie Mazurek, l’un des 4 réalisateurs de L’Enclume. Felicioli et Gagnol ont une approche artisanale et défendent le film d’auteur, on se sent proches de leur univers. »

2D versus 3D

Echanges de dessins avec la France et évaluations ont ainsi rythmé, pendant quelques mois, la vie du studio où ont été animées, segment après segment, 12 minutes du projet. La Belgian Connection s’est ensuite déployée dans des cadres divers, avec notamment la contribution d’intervallistes belges, ou encore une partie significative de la post-production confiée au Studio l’Equipe, à Bruxelles, ou le recours à des acteurs du cru pour certaines des voix du film -Patrick Ridremont et Patrick Descamps campent ainsi des truands particulièrement savoureux.

Alors que le film vient de sortir en salles sur une jolie combinaison de 20 copies, Annemie Degryse dresse un premier bilan de l’expérience. « Je me suis lancée dans le projet par passion, avant de me demander ce que j’avais fait. Lever les fonds n’a pas été évident, en dépit du soutien immédiat des 2 Communautés. La crise amène la prudence, et il n’est pas facile de convaincre les investisseurs potentiels de miser sur de l’animation en 2D. » De fait, à l’heure où Disney et les autres, de Moi, Moche et méchant en Megamind, ne jurent que par la 3D , Une vie de chat a pour ainsi dire des allures de délicieux anachronisme. Ce qui n’ôte rien à la qualité d’une £uvre que pourrait encore booster l’annonce récente de sa sélection à la Berlinale…

TEXTE JEAN-FRANÇOIS PLUIJGERS

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