La Consolation des choses rondes

Clemens J. Setz avait déjà prouvé son goût des abysses retors, entre onirisme et psychiatrie. C’était notamment le cas dans Les femmes sont des guitares (dont on ne devrait pas jouer), roman-labyrinthe de 1 000 pages. Si cette fois l’auteur autrichien nous visse dans une empathie teintée de malaise en format court, il n’abandonne pas sa patte étrange. C’est qu’il a un don pour faire surgir des micro-phénomènes qui font tressauter ses personnages. Dans Kvaløya, une voyageuse qui explore l’Île aux baleines le fait en compagnie d’un  » ohr« , sans qu’on ne sache jamais tout à fait qui est cette créature mélancolique. Du narrateur qui s’agace de soudain exsuder la même odeur que son père dans Les Visages dans les miroirs des ascenseurs de l’immeuble à celui qui, nouvellement en couple avec une jeune aveugle, découvre les murs de l’appartement de sa compagne constellés d’injures ( Loutre loutre loutre), beaucoup de ceux qui peuplent ces nouvelles ont à composer avec leur épaisse couche de solitude existentielle. Quoi de plus impersonnel qu’un SPAM? Dans un monde en mutation, c’est pourtant le moyen employé par une certaine Sarah Martingal pour annoncer à un homme aimé autrefois qu’il a un fils. Au sortir du recueil, nous flottons, admiratifs et inquiets.

De Clemens J. Setz, éditions Jacqueline Chambon, traduit de l’allemand (Autriche) par Stéphanie Lux, 304 pages.

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