La chance vous sourit

Vainqueur du prix Pulitzer en 2013 pour La Vie volée de Jun Do, Adam Johnson réussissait un doublé en 2015 avec l’obtention du National Book Award pour ce volume de six nouvelles denses, qui tantôt grincent, tantôt déclenchent la sidération ou les larmes. Dans La chance vous sourit, qui donne son titre au recueil, il se fait la chambre de résonance de deux transfuges nord-coréens en pleine réinsertion dans le sud, l’un cherchant à s’adapter au plus vite, l’autre restant pétri de nostalgie. Nirvana, baigné de la musique de Kurt Cobain, est tout sauf paradisiaque: un spécialiste d’e-reputation de Palo Alto y recrée l’hologramme d’un président assassiné afin de trouver des réponses au désarroi immense que provoque la maladie de son épouse. George Orwell était un de mes amis nous conduit dans la promenade d’un ancien gardien de prison de la Stasi, prêt à saboter la visite guidée de son ancien lieu de travail devenu musée, histoire de ne jamais se remettre en question. Bien peu de recueils vous laisseront à ce point l’impression de porter les personnages de ses novellas sous la peau, grattant à la surface, désemparés et cherchant une issue de secours, parfois dans la technologie, parfois dans le déni le plus patent. C’est dans les montages psychologiques nuancés que l’auteur octroie à ces êtres tiraillés, qu’il se fait le plus impressionnant. Qu’ils vous paraissent amoraux ou au contraire en bonne voie de repentir a alors moins d’importance que le fait qu’ils sonnent effroyablement, magnifiquement vrai.

D’Adam Johnson, éditions Albin Michel, traduit de l’anglais (États-Unis) par Antoine Cazé, 320 pages.

8

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content