L’étranger

Tinariwen chante son blues du désert avec Warren Ellis, Cass McCombs, Stephen O’Malley et Noura Mint Seymali. Sables émouvants.

Tamikrest, Terakaft, Bombino, Kel Assouf… Beaucoup leur ont emboîté le pas. Marchant dans les sables brûlants du désert sur les traces de leurs chameaux. Tinariwen n’en est pas moins resté la tête de gondole, le patron, le fer de lance du rock touareg. Son principal ambassadeur aussi. Lui qui remportait en 2012 un Grammy pour le meilleur album de musique du monde. Depuis plus de 35 ans (le groupe a été créé en 1982 lors d’un festival à Alger), Ibrahim Ag Alhabib et les siens défendent la cause de leur peuple, chantent l’exil et la souffrance. On peut parler de rock, de blues. Mais la musique de Tinariwen, c’est l’assouf. Une espèce de mélancolie heureuse. Assouf signifie « solitude » et « nostalgie » en tamasheq. Et c’est en effet ce qui se dégage de ces chansons à la fois marquées par leur poésie et leurs velléités politiques. Tinariwen lutte pour sauver une culture et un mode de vie façonnés par le désert. Il porte aussi surtout les revendications d’une communauté qui n’est toujours pas en sécurité chez elle dans le nord du Mali.

L'étranger

Amadjar (« l’étranger de passage » en langue tamasheq) est un disque à l’image des Touaregs. Un album nomade fabriqué au Maroc dans un camping-car converti en mini-studio mais aussi dans une tente sous la lune des sables mauritaniens. Treize chansons captées en quelques prises seulement, sans aucun haut-parleur ou effet.

Après le désert algérien ( Tassili) et californien ( Emmaar), Tinariwen a cette fois travaillé dans le Sahara occidental entre Taragalte et Nouakchott. Et pour le coup, le groupe n’a pas lésiné sur les invités. C’est du côté du rock qu’il s’en est majoritairement allé les chercher. Le casting est aussi inattendu qu’impressionnant. Le Bad Seeds Warren Ellis, violoniste préféré de Nick Cave, participe à pas moins de cinq titres. Micah Nelson, le fils de Willie, accessoirement guitariste de Neil Young, joue de la mandoline et du charango. On croise même Stephen O’Malley, le bruyant guitariste de Sun O))), l’Alsacien Rodophe Burger (fondateur de Kat Onoma) et le Californien Cass McCombs. Instruments traditionnels et guitares électriques… Tinariwen a aussi contribué à l’emploi local. Partis durant deux semaines bivouaquer en caravane, les musiciens ont embauché Noura Mint Seymali et son mari le guitariste Jeiche Ould Chighaly. L’autrice, chanteuse, compositrice et musicienne griotte de Mauritanie se distingue avant tout sur le planant et vibrant Amalouna. L’un des grands moments avec Madjam Mahilkamen de cette invitation au voyage et à l’empathie. Amadjar offre une vision du monde où le partage et l’hospitalité ne sont pas négociables et se bat à sa manière contre la marginalisation des Touaregs. Kel Tinawen dénonce ainsi la trahison et la corruption. Un album profond, engagé, envoûtant, qui célèbre l’art de la résistance, la magie de la musique et le pouvoir des mots.

Tinariwen

« Amadjar »

Distribué par Wedge/Pias.

8

Le 26/10 au Trix (Anvers) et le 27/10 au Depot (Louvain).

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