L’en vert de nos corps

© ISABELLE JOSSE

Sorti à l’orée du printemps -avant que les saisons ne deviennent floues- mais tout sauf périssable, voici un livre intime sur le monde végétal, à l’hybridation réussie: racines plongées durablement dans la science et cimes tournées vers la poésie. On trouvera ici autant d’émerveillement authentique que d’anecdotes historiques, ludiques ou tissées dans la sève de la légende. Connaissez-vous par exemple les arbres qu’on dit mangeurs d’hommes? Sensiblement préfacé par la toujours ad hoc Vinciane Despret qui convoque à raison Ursula Le Guin et sa fiction-panier, L’en vert de nos corps est conçu comme une récolte de butineuse (ou de glaneuse, comme Agnès Varda). C’est en effet avec une curiosité de tous les instants que Christine Van Acker agence ses fragments, faisant son miel non seulement de recherches variées précises -avec un goût pour la nomenclature et pour les phénomènes sonores, elle qui écrit aussi pour la radio- mais n’hésitant pas à aller piocher chez de nombreux auteurs de chevet, d’Emanuele Coccia à la Botanique de Goethe, d’André Dhôtel à Ovide. Reste, en dernier tiers de pomme, un regard amusé posé sur tout ce qui pousse, y compris les petits d’hommes confrontés au monde vert. L’autrice nous redit d’ailleurs bien combien, au-delà des données mesurables, d’un lexique à croquer et à chérir (de la tagette lucida ou estragon mexicain au gouet tacheté, de la famille des Araceae) et d’un engouement collectif renouvelé (qui n’a pas eu recours aux forêts ces derniers mois quand tant d’autres murs se dressaient ?), s’intéresser à la nature est aussi une expérience éminemment personnelle, viscérale, parfois trouble. Nous avons beau savoir qu’ils existent en et pour eux-mêmes, il est des arbres que nous considérons davantage les nôtres.

L'en vert de nos corps

Non-fiction De Christine Van Acker, éditions L’Arbre de Diane, 232 pages.

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