L’Abolition des privilèges

En 2014, Bertrand Guillot donnait vie, Sous les couvertures, aux livres achalandés en rayons d’une librairie, imaginant les moins exposés bien décidés à renverser l’ordre établi pour se faire une meilleure place au soleil. Oubliés en de sombres recoins, ils contestaient la péroraison satisfaite de ceux qui trônaient repus sur les tables les plus prisées des visiteurs. C’est cette fois dans un tout autre théâtre qu’il invite son lecteur, pour lui narrer une histoire qui n’a sans doute pas tout à fait rien à voir. Celle de la nuit versaillaise du 4 août 1789, moins d’un mois après la prise de la Bastille, où un petit millier de députés auront mis à bas l’intégralité des avantages réservés aux mieux nés, les exemptions fiscales de territoires entiers et un ordre établi sans discussion possible depuis belle lurette. Fort d’un phénoménal travail de recherche, sur un ton malicieux ne versant ni dans le surplomb érudit ni dans l’inepte anecdote, Guillot exprime comment une troupe bigarrée, presque sans le vouloir et par des effets de bandes comme de manche, est parvenue sinon à empêcher les privilèges de refleurir sous d’autres formes, au moins à faire dérailler « un Régime qui ne se [savait] pas encore Ancien ». Si les parallèles avec la situation actuelle affleurent ici sans fard, l’auteur a préféré s’associer les services de quelques figures méconnues pour extraire de la naphtaline une épopée parlementaire oubliée autant qu’édifiante, qu’il parvient à rendre palpitante malgré sa complexité. Un exploit didactique, autant que littéraire.

De Bertrand Guillot, éditions Les Avrils, 288 pages.

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