K comme Kolonie

Marie José Mondzain a longtemps été connue comme une grande savante -une spécialiste incontestée de l’iconologie byzantine, dont les réflexions sur le statut des images en Occident renversaient ce que nous croyions savoir des relations que nous entretenons avec elles. Mais, ces dernières années, son discours a pris un virage de plus en plus militant. C’est d’abord à une certaine tyrannie contemporaine du visuel qu’elle s’était attaquée ( L’image peut-elle tuer?, Bayard, 2002; Homo spectator, Bayard, 2007; etc.), avant d’élargir le spectre de sa critique aux conditions du capitalisme contemporain ( Confiscation, Les Liens qui Libèrent, 2017). Avec K comme Kolonie, elle tente un pas de plus. Via une lecture nouvelle d’une des oeuvres les plus célèbres de Franz Kafka, La Colonie pénitentiaire, une lecture prenant la forme d’un labyrinthe de brèves digressions pouvant rappeler Giorgio Agamben, elle dresse le portrait de notre époque en ère kafkaïenne. Par là, il ne faut pas entendre, comme le voudrait un cliché attaché au nom de l’écrivain tchèque, l’âge d’un triomphe de l’absurdité bureaucratique, mais celui d’une colonisation générale par le pouvoir, inscrivant son emprise jusque dans la chair des sujets. Constat implacable, son analyse se veut aussi un message stratégique: celui de l’opportunité d’un mouvement de décolonisation -dont Kafka nous donne aussi l’espoir. À méditer d’urgence.

De Marie José Mondzain, éditions La Fabrique, 248 pages.

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