LE BEAU-FRÈRE DE STANLEY KUBRICK ET PRODUCTEUR EXÉCUTIF DE PLUSIEURS DE SES FILMS EST AUSSI LE GARDIEN DU TEMPLE…

Peu connu du grand public, Jan Harlan est pourtant l’un des maillons essentiels de la galaxie Kubrick ( lire notre dossier page 8), qu’il avait intégrée à la fin des années 50. Actrice dans Les sentiers de la gloire, sa s£ur, Christiane, épouse en effet le réalisateur dans la foulée, en 1958. A sa qualité de beau-frère, Harlan ajoute bientôt celle de proche collaborateur, une aventure qui débute sur Napoléon, projet avorté de Kubrick, avant de prendre de l’ampleur au c£ur des années 70 lorsque, à compter de Barry Lyndon, il devient le producteur exécutif de tous ses films -activité qu’il étendra même au Artificial Intelligence de Spielberg. Un homme de l’ombre donc, qui, avec la disparition du maître, en 1999, se mue en gardien du temple -entendez du vaste héritage kubrickien: 13 films, à peine, mais quels films!, dont le pouvoir de fascination ne s’est jamais démenti; il suffit, à cet égard, de voir l’Himalaya éditorial consacré au réalisateur de Eyes Wide Shut.

Passeport pour la postérité

Harlan, pour sa part, n’a laissé à personne d’autre le soin de réaliser un portrait de son proche. C’était au lendemain de sa mort, et A Life in Pictures montrait le cinéaste visionnaire dans son intimité et au travail. Soit un trésor d’informations, que complète aujourd’hui une remarquable exposition, montée pour l’heure à Paris après Francfort et Gand notamment, et réalisée à l’aide des trésors de The Stanley Kubrick Archive, à Londres; une opération à laquelle il n’a pas manqué de donner son blanc-seing. « Quand Stanley est mort, il nous a laissé des centaines et des centaines de boîtes d’archives professionnelles soigneusement étiquetées, raconte-t-il, alors qu’on le retrouve au c£ur du module consacré à 2001. Le fait qu’il ait conservé ce matériel professionnel valait autorisation de l’utiliser. Restait à savoir comment procéder. Et c’est là qu’est intervenu le Deutsches Filmmuseum de Francfort. » Le seul inventaire des fonds prend plus d’un an, après quoi un tri est opéré afin d’en dégager le matériel utile à une exposition grand public. Pour un résultat que l’on ne saurait mieux qualifier que de probant, tant l’exposition réussit à immerger le visiteur dans l’univers et l’imaginaire du réalisateur, tout en rendant justice à son génie.

De quoi arracher à Harlan un sourire de -légitime- satisfaction: « Sans être en rien indiscrets, nous rendons hommage à Stanley. Et nous montrons combien d’amour, de travail et de passion peut aller dans un film. Ce n’est pas obligatoire, mais c’est indispensable pour réussir une £uvre artistique appelée à rester, et c’est une condition qui vaut également pour un romancier, un compositeur ou un peintre: un artiste doit pleinement s’immerger dans son £uvre pour aspirer à demeurer pertinent pour les générations futures. » S’agissant de Kubrick, la postérité lui est acquise. Quant à dégager un film de son £uvre? « Eyes Wide Shut a été le film le plus difficile de toute sa vie, et il considérait aussi que c’était sa contribution majeure au cinéma. » L’un n’allant sans doute pas sans l’autre…

JEAN-FRANÇOIS PLUIJGERS

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